Evaluation de l'effet de la substitution des antibiotiques promoteurs de croissance par des produits naturels sur les performances zootechniques et la santé intestinale chez le poulet de chair
Résumé
Cette étude a été conduite dans le but d’évaluer l’effet de la substitution de l’antibiotique promoteur de croissance (APC) par des additifs phytogéniques (à base d’extraits de plantes). Au total, 16000 poussins d’un jour type chair non sexés de souche Cobb500 ont été répartis aléatoirement sur 2 bâtiments, à raison de 8000 sujets par bâtiment, avant d’être affectés par tirage au sort à l’un des traitements suivants dénommés arbitrairement TENRA et TDUO. TENRA correspond à l’ENRAMYCINE utilisé à raison de 150g/tonne d’aliment associé à un anticoccidien chimique (NICARBAZINE en période de démarrage et SALINOMYCINE pour la période croissance). Alors que le traitement TDUO est à base de deux produits comerciaux: Kerlait et Emanox utilisés respectivement à raison de 60 g et 90 g/tonne d’aliment ces additifs a pour principes actifs majeurs le thymol, le cinnamaldéhyde, le carvacrol, le bornéol et l’allicine. Les paramètres zootechniques (poids vif moyen, poids au m2, gain de poids, consommation alimentaire, indice de consommation, taux de mortalité), la microflore intestinale (Escherichia coli, clostridies, coccidies) ainsi que les lésions macroscopiques et microscopiques ont été utilisés comme base de comparaison entre les deux traitements. Les autopsies ont été effectuées à J14, J24, J34 à raison de 05 sujets/traitement et par autopsies. Les résultats obtenus pour les deux traitements ont été comparés en utilisant une analyse de la variance (ANOVA) avec un niveau de signification P< 0,05. Le taux de mortalité, l’indice de consommation cumulé ainsi que le poids au m2 n’ont pas montré de différence significative (P>0,05) entre les traitements. Quant au gain de poids, la dernière semaine a connu une augmentation significative pour TDUO. La recherche d’E. coli n’a pas démontré de différence entre les traitements. Cependant, le milieu microbien des poulets de TENRA n’a pas été conforme aux données de la littérature. La recherche de coccidies a révélé que les individus du lot TDUO ont été indemnes à J34, contrairement au lot TENRA. L’application de l’indice morphométrique « I See Inside » (ISI) a permis l’évaluation des lésions macroscopiques et microscopiques en transformant les altérations observées en données quantitatives ce qui permet de comparer entre les différents traitements. Les lésions macroscopiques ont été dominées par des lésions intestinales et hépatiques pour les deux groupes. Le score ISI total de TENRA (toutes lésions confondues) a été significativement le plus élevé vers la fin de l’essai. Le même résultat a été noté pour les lésions microscopiques intestinales et hépatiques décelées lors des trois dates.
Mots-clés: Poulet de chair, antibiotique promoteur de croissance, additifs phytogéniques, intégrité intestinale, performances.
Téléchargements
Introduction
Le secteur de l’élevage a connu une mutation sans précédent en l’espace de quelques décennies. L’essor de la demande en produits alimentaires d’origine animale dans les pays enregistrant une forte croissance économique s’est traduit par une augmentation marquée de la production animale, encouragée par des innovations technologiques de premier plan et des changements structurels (FAO, 2018). Dans ce contexte de croissance de la population mondiale, le secteur de la volaille s’est fortement développé et à commencer à s’industrialiser dans de nombreuses régions et pays du monde (Deman, 2016) tel le Maroc. Ainsi, la viande de volaille a enregistré une très forte évolution de la consommation absolue mais aussi de la consommation mondiale par habitant.
Afin de répondre à la demande croissante en cette denrée, les industries avicoles ont incorporé les antibiotiques dans l'alimentation de volailles en tant que promoteurs de croissance pour améliorer la production de viande (Chattopadhyay, 2014). Mais malgré les effets bénéfiques bien démontrés de ces derniers sur l'amélioration du taux de croissance, la réduction de la mortalité et l'incidence des maladies, leur utilisation était également associée à certains inconvénients et défis. En effet, l’utilisation des antibiotiques à cette fin a été fortement incriminée dans l’émergence du phénomène de l’antibiorésistance, ce qui constitue une menace potentielle pour la santé humaine (FAO, 2018). Comme résultat, leur utilisation en tant qu'additifs pour l'alimentation animale a été interdite ou réglementée dans plusieurs juridictions (Jha et al., 2015).
Toutefois, parallèlement aux restrictions imposées à l’usage des antibiotiques promoteurs de croissance (APC), plusieurs alternatives non thérapeutiques ayant des effets bénéfiques similaires aux produits conventionnels ont été développées. L'objectif de ces alternatives est de maintenir un faible taux de mortalité, un bon niveau de rendement animal tout en préservant l'environnement et la santé des consommateurs. L’approche alternative aux APC est basée majoritairement sur l’addition des probiotiques, prébiotiques, acides organiques, enzymes et huiles essentielles à l’aliment de poulet de chair.
Ainsi, la présente étude a été conduite afin d’évaluer l’effet de la substitution d’un antibiotique promoteur de croissance par des produits phytogéniques. Les principaux critères étudiés sont les performances zootechniques, la composition du microbiote intestinal, et la santé intestinale aussi bien macroscopique que microscopique en appliquant un indice morphométrique ISI «I See Inside», qui transforme les altérations en données quantitatives (Santin et al, 2017) et permet ainsi d’effectuer des comparaisons entre les différents traitements.
Matériel et méthodes
Protocole expérimental
La présente étude a été conduite moyennant un essai expérimental qui s’est étendu depuis le mois de Février jusqu’au mois d’Avril 2019. L’essai a porté sur 16000 poulets de chair de souche Cobb 500 répartis dans deux bâtiments (1 et 2). Chacun des deux bâtiments a été affecté, par tirage au sort, à l’un ou l’autre des deux traitements selon le protocole suivant:
• Le bâtiment 1: dénommé ‘’TENRA’’ représente le bâtiment témoin positif hébergeant 10000 poussins nourris par un aliment contenant un antibiotique promoteur de croissance (APC) à raison de 150 g d’Enramycine/tonne d’aliment et un anticoccidien chimique (Nicarbazine ou Salinomycine selon la période).
• Le bâtiment 2: dénommé ‘’TDUO’’, composé de 6000 poussins a reçu le même aliment de base, mais où l’antibiotique promoteur de croissance a été substitué par un antibactérien naturel (KERLAIT) incorporé à raison de 60g/ tonne et l’anticoccidien a été remplacé par un produit naturel (EMANOX) additionné à hauteur de 90g/tonne. La composition des deux produits naturels utilisés en composants actifs et les propriétés pharmacodynamiques de ces derniers sont présentées dans le tableau 1.
Il est à noter que l’aliment et l’eau ont été distribués ad libitum tout au long de la durée de l’élevage, qui s’est élevée à 44 jours, et qu’aucune intervention vaccinale n’a été instaurée à la ferme et que tous les oiseaux ont été vaccinés au couvoir selon le programme suivant:
- Bronchite infectieuse et Newcastle: Vaccins vivants par nébulisation.
- Gumboro et Influenza aviaire (H9N2) Vaccins inactivés en injectable.
Afin de comparer les deux lots de poulets, plusieurs paramètres ont été évalués à savoir les performances zootechniques enregistrées quotidiennement, un scoring lésionnel macroscopiques et microscopiques de l’appareil digestif et des prélèvements du contenu intestinal effectués aux J14, J24 et J34 d’âge des oiseaux.
Tableau 1: Composition des produits KERLAIT et EMANOX
Mesures et analyses
Performances zootechniques
Les deux lots d’animaux (TENRA et TDUO) ont fait l’objet de suivis quotidiens, et à la même heure, par la mesure de en effet, la consommation alimentaire et le relevé du nombre d’oiseaux morts. En outre, des pesées hebdomadaires ont été réalisées sur un échantillon de 50 poulets par lot. Ainsi, les paramètres suivants ont été déduits et calculés: le poids vif moyen, le gain moyen quotidien, l’Indice de consommation (IC), l’IC cumulé et le taux de mortalité.
Lésions macroscopiques et microscopiques
Les lésions macroscopiques et microscopiques ont été mesurées selon la méthode (ISI, 2017). Cinq animaux par bâtiment ont été sélectionnés de façon aléatoire et euthanasiés pour faire l’objet d’examens nécropsiques et de prélèvements pour l’évaluation histopathologique. Les autopsies ont été effectuées à trois différentes dates; J14: durant la phase de démarrage, J24: suite à la transition alimentaire et à J34: marquant la fin de l’expérimentation.
Les 3 autopsies ont été réalisées par les mêmes personnes afin de minimiser la subjectivité de l’évaluation des lésions et garantir ainsi la reproductibilité des résultats. L’objectif de ces examens nécropsiques a été de dresser un tableau lésionnel pour chaque appareil et de représenter le degré d’altération par un score numérique, en prenant comme référence la méthodologie «I See Inside» (ISI) élaborée par Santin et al (2017). En effet, cette technique se base sur 2 variables: le facteur d’impact et l’intensité d’altération de chaque organe. Un facteur d’impact (IF) est donné pour chaque modification macroscopique en fonction de la réduction de la capacité fonctionnelle des organes.
L’intervalle de l’IF est de 1 à 3, où 3 est le score le plus endommageant pour la fonction de l'organe. En outre, l'étendue de chaque lésion par rapport à un organe non affecté est évaluée dans chaque organe/tissu par animal et le score varie de 0 à 3: score 0 (absence de lésion), score 1 (altération jusqu'à 25% de la surface de l’organe), score 2 (altération de 25 à 50% de la surface de l’organe), et score 3 (étendue d'altération supérieure à 50% de la surface). Ainsi, une valeur finale est obtenue en multipliant le facteur d’impact par le score lésionnel.
En parallèle, des prélèvements de 3 à 5 cm de longueur de chaque portion intestinale (le duodénum, le jéjunum, l’iléon et les cæca) et du foie ont été récupérés et fixés dans la solution de Davidson avant d’être transférés dans le formol neutralisé à 10%.
Les coupes histologiques ont été réalisées suivant le protocole standard passant par les étapes de la déshydratation et l’éclaircissement, suivies de l’imprégnation par la paraffine et la mise en bloc avant de monter les tissus à analyser sur des lames pour effectuer une coloration à l’Hématoxyline éosine permettant d’accentuer le contraste des différents éléments de la préparation.
La lecture des lames a été faite à l’aide du microscope optique Optika Microscope Italy muni d’une tablette à caméra, afin de mettre en évidence les différentes lésions histologiques au niveau du foie et de l’intestin (duodénum, jéjunum, iléon et cæca). Les lésions microscopiques ont été évaluées de façon numérique en se basant également sur la méthode ISI. En effet, le score de la lésion microscopique correspond au nombre de cellules qui caractérisent cette lésion ou son étendue.
Il est à souligner que la lecture des lames a été faite par une seule et même personne pour diminuer les facteurs de variations, selon le protocole suivant :
Pour la morphologie intestinale, cinq villosités intestinales par individu ont été observées au grossissement 100X (grossissement 1000X est utilisé uniquement pour confirmer les modifications).
- Pour l’évaluation du foie, 5 champs ont été choisis par individu.
A la fin de ces évaluations microscopiques, un score final a été attribué pour chaque individu en calculant l’indice ISI = IF * S où IF représente le facteur d’impact et S le score observé permet l’évaluation numérique des lésions microscopique observées.
Analyses bactériologiques et parasitaire
Lors des autopsies réalisées, des échantillons du contenu iléal et caecal ont été systématiquement prélevés pour chaque individu euthanasié. Ces prélèvements ont fait l’objet d’analyses bactériologiques et parasitaire pour le dénombrement des souches d’E. Coli, Clostridies et Eimeria.
Les géloses de l’Eosine bleu de méthylène et le Tryptone-Sulfite-Cyclosérine ont été ensemencées pour détecter respectivement E. coli et Clostridium. L’isolement bactérien a été réalisé en conformément aux exigences des souches, en effet, une incubation à 37 °C pendant 24 heures a été assurée pour E. Coli, contrairement aux clostridies qui exigent des conditions d’anaérobiose et une incubation de 48 heures. Cependant la recherche des oocystes d’Eimeria a été effectuée en se référant à la technique de flottaison; une goutte du contenu est ensuite observée au microscope optique avec un grossissement X400.
Analyse statistique
Les données générées par la présente étude ont été traitées en utilisant une analyse de la variance à deux critères de variation (Traitement et âge). Les calculs ont été faits au moyen du logiciel SPSS (IBM SPSS Statistics 22) et les différences ont été considérées significatives au seuil de 5 %.
Résultats
Effet des traitements sur les performances zootechniques:
Le poids vif moyen
Les pesées ont été effectuées à chaque fin de semaine et ont permis d’obtenir les poids vifs moyens hebdomadaires. Le poids à J44 correspond au ratio entre le poids total à la vente et l’effectif restant en fin de bande (Tableau 2).
Les 3 premières semaines d’âge ont montré une différence significative du poids vif moyen du côté de TENRA par rapport à et TDUO. Ce constat a été maintenu jusqu’à la fin de l’expérimentation, en effet, les pesées à J44 enregistrent une augmentation significative du poids obtenu dans le groupe TENRA en comparaison avec le TDUO.
Tableau 2: L'évolution du poids vif moyen (g) en fonction des traitements
Toutefois, un autre paramètre zootechnique a été déduit, il s’agit du poids final au mètre carré qui prend en considération la densité de l’élevage, ainsi que la production en poids vif au m2. Cet indicateur économique révèle que pour la même superficie, le lot TDUO permet de produire plus de poids vif mais ce constat n’est pas statistiquement significatif (Tableau 3)
Tableau 3: Le poids vif moyen final (g), le poids en m2 en fonction des traitements
Le gain moyen hebdomadaire
Comme pour le poids vif moyen, les 3 premières semaines d’âge ont montré un gain moyen de TENRA significativement supérieur à celui de TDUO. Cependant, lors de la 5ème semaine, les individus du lot TDUO ont présenté un gain moyen significativement supérieur au TENRA (Tableau 4).
Tableau 4: Gain moyen en fonction des traitements par semaine.
L’indice de consommation
L’indice de consommation final obtenu dans le groupe TENRA est supérieur à celui du lot TDUO, cette différence favorable pour le TDUO n’est cependant pas statistiquement significative.
Tableau 5: L'indice de consommation par semaine et indice de consommation cumulé.
Le taux de mortalité (TM)
Durant la présente étude, le groupe TENRA a montré un taux de mortalité cumulée plus élevé par rapport au lot TDUO, cependant aucune différence statistiquement significative n’a été remarquée entre ces deux traitements.
Tableau 6: Effet des traitements sur le taux de mortalité.
Effet des traitements sur l’évolution des lésions macroscopiques et microscopiques:
Lésions macroscopiques
Les autopsies effectuées au niveau de l’élevage nous ont permis de déceler toutes les lésions macroscopiques affectant différents organes et appareils. Les systèmes et appareils suivants ont été évalués, à savoir l’appareil locomoteur, digestif, respiratoire, urinaire, cardiaque et lymphatique.
En se basant sur la méthode I See Inside (ISI), les résultats obtenus après les trois autopsies réalisées à J14, J24 et J34 sont consignés dans la tableau.7
Tableau 7: Les scores moyens ISI des lésions macroscopiques des différents organes, appareils et systèmes observées à J14, J24 et J34.
Il est à noter que les lésions de l’intestin sont dominantes par rapport aux autres appareils. Le groupe TENRA présente des scores de lésions intestinales et hépatiques les plus élevés à J14. Cependant, aucune différence significative n’a été détectée entre les deux traitements suite à l’analyse statistique.
A J24, les 2 groupes ont connu une augmentation générale des scores ISI des lésions intestinales et hépatiques ainsi que du score total. Le TDUO enregistre les scores de lésions intestinales et hépatiques les plus élevés, mais aucune différence significative n’a été détectée.
Cependant, lors de ces deux premières autopsies, aucune lésion n’a été détectée pour le système lymphatique, l’appareil urinaire et le cœur pour les trois traitements.
L’augmentation des scores lésionnels se poursuit jusqu’au 34ème jour d’âge, en effet, les 2 traitements ont connu des scores ISI plus élevés au niveau des appareils locomoteur et respiratoire. Les scores des lésions intestinales de TENRA observés à J34 ont augmenté par rapport à J24 (de 7,2 à 7,8) tandis que ceux TDUO ont diminué à cette même date, en passant de 8,6 à 7,6. Les individus du TENRA présentent un score total significativement supérieur à celui de TDUO.
Il est à noter que l’augmentation continue du score total du groupe TENRA en passant de 3,2 (J14) à 7,8 (J34) est principalement dû au renforcement des lésions d’épaississement de la paroi intestinale à J24 et ceux de la congestion à J34. Néanmoins, le groupe TDUO a marqué une augmentation rapide du score ISI total passant de 2,8 (J14) à 8,6 (J24) dû principalement à l’augmentation du score de congestion intestinale passant de 0,4 (J14) à 6 (J24) mais aussi du score d’épaississement de la paroi intestinale. Une régression de ce score vers la valeur de 7,6 a été remarquée à J34 suite à l’absence d’une multitude de lésions (Figure 1).
Figure 1: Evolution des lésions intestinales
Le foie est un organe annexe à l’appareil digestif qui a enregistré également des lésions variables en fonction du groupe qui ont évolué avec l’âge. En effet, une augmentation générale des scores ISI totaux des lésions hépatiques de J14 à J34 pour les individus du TENRA et de J14 à J24 pour ceux de TDUO.
L’augmentation continue du score total passant de 1,8 (J14) à 2,8 (J34) du groupe TENRA est principalement due aux lésions de congestion et de friabilité hépatique.
Un pic de score ISI total de 3,8 est observé à J24 chez le lot TDUO suite à l’accentuation de la friabilité et de la décoloration. Une légère régression de ce score est remarquée à J34. Il est à signaler qu’aucune différence significative n’a été remarquée entre les scores totaux des différents traitements à chaque date suite à l’analyse statistique.
Lésions microscopiques
Pour l’évaluation des lésions intestinales, 5 villosités ont été choisis par individu. La moyenne des 5 villosités observées pour chaque individu représente la valeur finale de cette lésion et la somme de toutes les moyennes des lésions donne le score ISI final pour chaque individu.
En effet, une augmentation continue du score ISI total chez le groupe TENRA a été notée, en passant de 6,6 (J14) à 10,1 (J34). Ceci est principalement dû à l’infiltration lymphocytaire de la Lamina propria (LP) et de l’épithélium entrainant l’augmentation de leurs épaisseurs ainsi qu’aux lésions de congestion. Cependant, un pic de score ISI total de 9,1 a été observé à J24 chez les individus du groupe TDUO suite à l’accentuation des scores d’infiltration lymphocytaire de la LP et de l’épithélium et l’augmentation de leurs épaisseurs ainsi qu’à ceux de congestion. Une récupération est remarquée à J34 où le score total s’est stabilisé à 8,32 (Figure 2).
Figure 2 (a, b): Coupe histologique d’une villosité intestinale
1- Infiltration lymphocytaire et augmentation de l’épaisseur de la LP, score 2, 2- Prolifération des entérocytes et augmentation de l’épaisseur de l’Ep, score 1, 3- Prolifération des cellules caliciformes, score 1, 4- Infiltration lymphocytaire de la LP, score 1, 5- Congestion, score 2
Pour l’évaluation du foie, 5 champs ont été choisis par individu. La moyenne des 5 champs représente la valeur finale de cette lésion et la somme de toutes les moyennes des lésions donne le score ISI final pour chaque individu.
Il a été constaté une augmentation continue du score ISI total du lot TENRA, passant de 4,32 (J14) à 6,52 (J34), suite à l’accentuation des lésions histologiques résultant de l’hémorragie et de la congestion (Figure 3).
Le groupe TDUO a enregistré un pic de score ISI total de 5,6 à J24 suite à l’accentuation de l’hémorragie et l’apparition de lésions de nécrose à cette date. Les individus de ce groupe ont pu récupérer à J34, ce qui s’est traduit par une diminution du score ISI total à la troisième autopsie (5,32).
Cependant, l’analyse statistique n’a démontré aucune différence significative entre les deux traitements.
Figure 3: Coupe histologique du foie
A: épaississement des espaces sinusoides suite à une congestion et une infiltration par les lymphocytes -score2, B: congestion et infiltration lymphocytaire - score2 (Flèche)
En combinant les résultats des lésions relevées, une coordination dans le temps entre le développement des lésions microscopiques et des lésions macroscopiques intestinales a été notée. Un score plus élevé en microscopie est observé, ainsi, les lésions histologiques apparaissent précocement permettant de prédire l’évolution du lot étudié (Figure 4).
Figure 4: Evolution du score ISI des lésions intestinales macroscopiques et microscopiques
Analyses bactériologiques et parasitaire
La recherche bactériologique dans les prélèvements de fientes n’a pas permis de déterminer le nombre exact de colonies présentes au niveau des boites de Pétri, ainsi nous nous sommes basés sur le critère présence/absence de colonies (107 colonies/0 colonies).
E. coli
Nous avons constaté que les cæca sont plus colonisés par E. coli que l’iléon à J34.
Les cæca des individus du TENRA sont tous peuplés par E. coli à J34, contrairement aux cæca des individus du traitement TDUO (Figure 5).
Figure 5: Evolution de la population d’E. coli au niveau de l’iléon et du caecum
Clostridium
Les iléons des individus du TDUO sont indemnes à J34 et n’ont pas révélé la présence de clostridies, cependant, trois individus de TENRA ont été colonisés par Clostridium.
Les clostridies ont été isolées à partir de tous les cæca de tous les individus autopsié (Tableau 8).
Tableau 8: Dénombrement des colonies de Clostridium au niveau de l’iléon et de Caeca a J14, J24 etJ34
Coccidiose
L’évaluation de l’infestation parasitaire a montré que le groupe TENRA a présenté de la coccidiose à chaque autopsie jusqu’à J34. Alors que, les individus du TDUO se sont révélés négatifs à la coccidiose à la fin de l’essai (Tableau 9)
Tableau 9: Effet des traitements sur la coccidiose
Discussion
Effet des traitements sur les paramètres zootechniques
Suite aux pesées effectuées hebdomadairement, une différence significative a été observée entre les deux groupes TENRA et TDUO. En effet, TENRA a montré des poids significativement supérieurs à TDUO. Toutefois, le calcul du poids corrélé au m2 a donné des résultats inverses. Effectivement, TDUO a donné des résultats supérieurs à TENRA mais aucune différence significative entre les traitements n’a été perçue. Ces résultats concordent avec ceux de Sarica et al (2005) qui ont rapporté que l'addition de poudre de thym à un régime alimentaire de poulet de chair n'avait pas d'effet positif significatif sur le poids vif des animaux. De plus, Demir et al (2003) ont comparé l’effet d’un produit contenant 70mg de thymol à celui d’un aliment témoin et n’ont noté aucun effet significatif du produit sur le poids vif des animaux. Dans le même contexte, Elmorabit (2018) a démontré une diminution du poids vif d’individus ayant reçu de l’ENRAMYCINE par rapport à ceux qui ont reçu de l’AVILAMYCINE et FLAVOMYCINE de -8,2% et -5,5%.
Contrairement à ces constats, des effets positifs du thym et de la cannelle sur les performances du poulets de chair ont été rapportés chez le poulet de chair (Kassie et Jameel , 2009) Dans ce sens, Toghyani et al (2010) ont noté que les régimes contenant du thym à raison de 5g/kg d’aliment ont augmenté significativement le poids vif des animaux. Egalement, Hernandez et al (2004) ont constaté que l'ajout d’extraits de plantes de thym, de sauge et de romarin à un régime alimentaire de poulets de chair améliorait significativement le poids corporel des poulets à l'âge de 35 jours. De plus, Cross et al., (2007) ont observé une amélioration de la croissance à différents âges chez les oiseaux suite à l’ajout de 10 g/kg d’extrait de plantes (thym, origan, marjolaine, romarin) à l’aliment. Ceci laisse supposer que les doses utilisées lors de notre essai étaient insuffisante pour entrainer une amélioration du poids vif des animaux.
Le gain de poids a connu une fluctuation continue pour les traitements au fil du temps. En effet, à chaque date, un traitement présentait un gain moyen significativement différent des autres. Toutefois, la dernière semaine a connu une augmentation significative du gain de poids de TDUO en comparaison avec TENRA. Cette amélioration de TDUO, après qu’il ait présenté un gain de poids significativement inférieur durant les semaines précédentes, peut être expliquée par le fait que l’effet stimulateur de la croissance de ce produit est probablement lié à l’âge des animaux. D’autres part, les propriétés favorisantes de croissance des extraits de l’ail ont été montrées dans plusieurs expérimentations (Toghyani et al, 2010) mais n’ont pas été systématiquement rapportées.
Cross et al., (2007) ont conclu que la qualité ainsi que la quantité de produits actifs dans les extraits végétaux déterminent la réaction des oiseaux. Certains paramètres peuvent influer sur l'utilité des additifs phytogéniques, dont notamment les parties de la plante et leurs propriétés physiques, la variation génétique et l'âge de la plante, les différentes doses utilisées, la période de récolte et la compatibilité avec les autres ingrédients qui peuvent également expliquer pourquoi une différence dans le gain de poids corporel peut survenir lorsque différents types de phytogéniques sont utilisés dans le régime des oiseaux (Yang et al., 2009). De plus, l'efficacité des phytogéniques alimentaires peut être influencée par des facteurs inhérents et étrangers tels que l'état nutritionnel des animaux, l'infection, la composition du régime alimentaire et les conditions environnementales (Giannenas et al, 2003).
Plusieurs études ont démontré l’effet bénéfique des produits phytogéniques sur le gain de poids moyen des animaux. Tiihonen et al. (2010) ont ajouté un mélange de 15 g/tonne de thymol et de 5 g/tonne de cinnamaldéhyde à un régime alimentaire de poulet sur une période de 42 jours. Ils ont constaté que le gain de poids était amélioré d'environ 5% et ont conclu que cela pourrait être dû à des changements bénéfiques dans la microflore intestinale.
Aussi, l’inclusion d’un mélange de thymol et de cinnamaldéhyde par Amerah et al (2011) dans les aliments pour animaux, s'est avéré améliorer le gain de poids corporel chez les poulets de chair. De plus, Guo et al., (2004) ont montré une augmentation significative du gain de poids corporel et une amélioration de l'efficacité alimentaire lorsque les poulets de chair recevaient un régime complété par un mélange de 14 herbes. Des résultats similaires ont été obtenus avec l'ajout d'origan à l’alimentation de la volaille (Florou-Paneri et al, 2006).
L’ail ainsi que le cinnamaldéhyde et le carvacrol, entre autres, sont utilisés depuis longtemps en raison de leurs propriétés d'amélioration des saveurs alimentaires. En effets, certains additifs phytogéniques pour l'alimentation animale sont souvent présentés comme améliorant de la saveur et de l'appétence des aliments pour animaux (Jugl-chizzola et al, 2006). Cependant, le nombre d'études ayant testé l'effet spécifique des produits phytogéniques sur l'appétence en appliquant un concept d'alimentation de choix est assez limité. Par conséquent, l'hypothèse selon laquelle les végétaux et leurs extraits améliorent l'appétence des aliments pour animaux ne semble pas se justifier en général (Windisch et al, 2008).
Les résultats de la présente étude montrent un indice de consommation final presque identique pour TENRA et TDUO. Ces données sont en accord avec celles d’un essai comparant l’effet d’un produit à base d’extraits de végétaux et un autre contenant un APC (Virginiamycine), où les 2 groupes ont montré une amélioration de l’IC entre J15 et J42, ce qui prouve que l’additif phytogénique a optimisé les performances des poulets de chair au même titre que l'APC (Calik et al, 2019). Toutefois, un essai effectué par Elmorabit (2018) a démontré que l’ajout de l’ENRAMYCINE, comme APC, avait donné un effet négatif sur l’indice de consommation cumulé par rapport au témoin négatif.
Une étude établie par Sahraoui et al (2016) a comparé les performances d’un lot expérimental A recevant de l’eau additionnée d’un anticoccidien à base d’extrait végétal (à base d’origan) à un lot témoin B recevant dans l’eau de boisson un anticoccidien chimique (Algicox et Joprox). En terme numérique, il a été constaté un meilleur IC pour le lot A par rapport au lot B. L’augmentation de ce dernier a fait suite à la survenue d’épisodes pathologiques, principalement de la coccidiose. L’anticoccidien à base de plantes naturelles utilisé chez le lot A a donc induit un effet positif sur l’efficacité alimentaire.
De plus, Mahmood et al, (2009) ont rapporté une amélioration de l’indice de consommation plus importante lorsqu’un broyat d’ail est donné aux animaux à une dose de 5g/kg (-15%) que de 10g/kg (-9%), alors que Malayoglu et al, (2010) ont rapporté l’inverse avec des extraits d’origan administrés à 0,25 g/kg +0%) ou 0,5 g/kg (-8%).
D’un autre côté, Jang et al (2007) n'ont trouvé aucune différence significative dans l’indice de consommation des poulets élevés dans des conditions optimales et nourris avec un produit contenant le thymol à 100 mg/kg d’aliment.
Les données enregistrées dans la présente étude ont montré un taux de mortalité plus élevé pour TENRA par rapport à TDUO, mais aucune différence significative n’a été remarquée entre les traitements. Ces constats sont en accord avec ceux d’un essai comparant 4 groupes de traitements : témoin T, APC, huile essentielle HE (origan, cannelle, poivre) et extrait de plante (Labiatae LE) dont les résultats ont montré une mortalité plus faible chez les poulets nourris avec les aliments LE et HE que chez ceux qui nourris avec les aliments APC et les témoins pendant toute la période de croissance (3,3 et 3,3 vs 6,6 et 10 %, respectivement) (Hernandez et al, 2004). En général, ce faible taux de mortalité obtenu serait probablement dû à l’absence d’infections, à la bonne qualité des poussins et aux conditions d’ambiance et d’hygiène qui respectaient les normes d’élevage de poulet de chair.
Effet des traitements sur les lésions macroscopiques
La présente étude a évalué l’effet de deux produits sur la santé des volailles, et a permis de déceler les lésions touchant les différents organes et appareils en appliquant l’indice morphométrique «I See Inside» (ISI). En se basant sur cette méthodologie, nous avons pu évaluer les lésions macroscopiques d’une manière numérique afin d’éviter la subjectivité de la comparaison. A chaque autopsie, les lésions macroscopiques touchant l’appareil digestif (intestins et foie) étaient celles qui ressortaient le plus.
A J14, les lésions touchant l’intestin étaient dominantes par rapport aux autres parties du TD. En effet, le poussin à l'éclosion passe d'une alimentation endogène riche en lipides provenant du jaune d'œuf à une alimentation exogène riche en glucides et en protéines (Sklan, 2001) ; ce qui peut provoquer un léger trouble des fonctions intestinales. A cette date, une différence significative des scores totaux des lésions macroscopiques est obtenue entre les traitements. De point de vue lésions intestinales, TENRA a présenté un score de congestion significativement élevé par rapport à TDUO. Contrairement à cela, un essai a prouvé que l’ajout de l’ENRAMYCINE à l’alimentation de la volaille diminuait significativement les scores de lésions macroscopiques à J14 comparé à l’ajout d’autres APC ou de produits naturels (Elmorabit, 2018). A J24, on note une augmentation des scores totaux des 2 groupes En effet, les individus du groupe TDUO ont montré des scores de congestion de la muqueuse intestinale et un score de friabilité du foie plus élevés en comparaison avec ceux de TENRA. En revanche, les individus de ce dernier ont présenté un score d’épaississement significativement élevé qui peut être expliqué par la cicatrisation des lésions macroscopiques détectés à J14.
Cette période fait suite à la transition alimentaire qui s’est effectué au 21ème jour ce qui expliquerait l’augmentation des phénomènes inflammatoires au niveau de l’intestin entraînant différentes lésions qui sont dues majoritairement au passage de la phase de démarrage à la phase de croissance. De plus, la période de fin 3ème semaine-début 4éme semaine est toujours critique en termes d’intégrité intestinale (aliment démarrage riche en protéine, pic de multiplication de E.acervulina, système immunitaire insuffisamment mature)
A J34, on remarque une diminution des scores ISI des lésions intestinales correspondant à TDUO. On suppose alors que le tube digestif commence à s’adapter après la transition alimentaire et les individus de ce groupe ont pu récupérer en restaurant leur intégrité intestinale. Cependant, les scores de lésions intestinales et hépatiques de TENRA ont poursuivi leurs ascensions. D’ailleurs, le score total de ce groupe est devenu significativement supérieur en comparaison avec TDUO. On peut penser dans ce cas que la flore intestinale de ces individus à développer une certaine résistance à l’antibiotique promoteur de croissance (APC) contenu dans l’alimentation et que ce dernier n’a plus d’effet bénéfique sur la santé intestinale.
Les scores des lésions hépatiques à cette date n’ont pas montré aucune différence significative entre les traitements. Certaines études ont évoqué que l’efficacité des APC est moindre si les conditions d’élevage sont optimales (Jang et al, 2007), donc pour juger l’effet de ces produits d’autres essais doivent effectués avec des challenges.
Effet des traitements sur les lésions microscopiques
Les différentes lésions qui touchent les intestins ainsi que le foie ont été décelées grâce à l’observation microscopique de ces tissus. En ce qui concerne les intestins, à peu près les mêmes affections surgissaient à chaque date : L’infiltration lymphocytaire de la Lamina Propria (LP) et de l’épithélium (Ep), l’augmentation de l’épaisseur de la LP et de l’EP mais aussi la congestion et en moindre intensité, la prolifération des cellules caliciformes.
A J14, l’infiltration de la LP est la lésion la plus frappante touchant les individus des deux lots sans aucune différence significative. Cette réponse inflammatoire est une sorte de réfutation normale aux attaques mêmes minimes, agressant la paroi intestinale, permettant ainsi au poussin l’adaptation à son nouveau mode de vie. TENRA a présenté un score de congestion significativement supérieur à celui du TDUO. Ceci est donc parfaitement corrélé avec l’évaluation macroscopique qui a montré un score de congestion hépatique de TENRA significativement élevé par rapport à TDUO.
A cette date, on remarque une prolifération légèrement élevée des cellules caliciformes chez les individus du TDUO. Ces cellules ont un rôle de protection de la muqueuse intestinale par la sécrétion des médiateurs tels que la mucine MUC2 (Taupin, 2003).
Dans ce sens, Yitbarek (2015) a démontré que les additifs phytogéniques pour l'alimentation animale augmentaient l'efficacité alimentaire par la stimulation de la sécrétion de ce mucus intestinal chez les poulets de chair, un effet dont on a supposé qu'il entravait l'adhésion des agents pathogènes et contribuait ainsi à stabiliser l'eubiose microbienne dans les intestins des animaux (Jamroz et al, 2006). Ces observations confirment l'hypothèse selon laquelle les additifs phytogéniques pour l'alimentation animale pourraient avoir un effet favorable sur les fonctions intestinales.
A J24, une augmentation des scores d’infiltration de la LP et de son épaisseur est perçue pour les 2 traitements, en plus de l’apparition d’une prolifération d’entérocytes dans les groupes TENRA. Durant cette période, les animaux ont été exposés à l’effet de la transition alimentaire, ce qui a entrainé une réaction de l’organisme se manifestant histologiquement par une infiltration lymphocytaire ainsi qu’une régénération cellulaire reflètent l’endommagement des cellules et le besoin du renouvellement cellulaire. Lee et al (2011) ont démontré que le Cinnamaldéhyde favorise une bonne prolifération cellulaire in vitro lors d’une expérience établie sur des rats de laboratoire.
La prolifération des entérocytes a été accompagnée par une prolifération des cellules caliciformes plus élevées du côté de TENRA en vue de la protection de la paroi intestinale.
A J34, nous remarquons des scores élevés de congestion, d’infiltration de la LP et l’augmentation de son épaisseur chez les individus de TENRA en comparaison avec ceux du TDUO. Cette augmentation des scores histologiques a fait suite à l’apparition de la coccidiose au niveau du TENRA, détectée par le comptage des œufs dans les matières fécales. Toutefois, nous n’avons pas trouvé d’oocytes sur les sections histologiques, ce qui peut être dû à la coloration ou au faible nombre d’oocystes. Ces résultats concordent avec ceux de Santin et al (2018) qui ont retrouvé les mêmes lésions intestinales chez des sujets challengés par Eimeria.
Comme attendu, les individus de TDUO, indemnes de coccidiose à J34, ont présenté des scores de lésions plus bas. D’ailleurs, Greathead et Kamel (2006) ont observé que l’addition de Thymol : Carvacrol (1:1) dans le régime alimentaire des poulets de chair infectés par E. acervulina améliorait probablement la santé intestinale en réduisant l’impact de la coccidiose sur l’intégrité des intestins.
Néanmoins, il y a peu de preuves sur l’action des produits phytogéniques sur l’histologie intestinale, et la plupart des études comparent la longueur des villosités et celles des cryptes, ce qui ne reflète pas l’état de la santé et de l’intégrité intestinale.
Concernant le foie, les lésions les plus détectées étaient l’hémorragie, la congestion et l’infiltration lymphocytaire comme nous avons également observé la prolifération des canaux biliaires.
A J14 et J24, TENRA a présenté des scores d’infiltration lymphocytaire et d’agrégats lymphatiques élevés. Ceci peut être expliqué par l’action locale de l’Enramycine évoquée par Santin et al (2018) et donc le faible effet sur le foie.
Cependant, TENRA a présenté des scores de prolifération de ces canaux biliaires à J14 et J24 ce qui a coïncidé avec la détection de colonies de Clostridium dans le contenu iléal des individus de ce groupe. Cependant, ce score a diminué à J34 par rapport à TDUO, et ce, malgré l’infestation continue du lot à cette date.
TDUO a présenté un score d’hémorragie le plus élevé à J14, puis il a diminué à J34 pour devenir inférieur à celui de TENRA. Le score d’infiltration lymphocytaire de TDUO a régressé en avançant dans l’essai. On suppose alors que le Borneol, principe actif du thym contenu dans le produit B agit progressivement comme un hépato-protecteur et que son effet dépend donc de l’âge des animaux.
Pour les lésions hépatiques comme pour les lésions intestinales, on remarque la même évolution du score ISI total de TENRA au fil du temps. En effet, son score a poursuivi l’ascension tout le long de la période d’expérimentation. Quant à TDUO, il a présenté des scores évolutifs entre J14 et J24 qui ont diminué à J34 aussi bien au niveau hépatique qu’intestinal. On suppose alors que l’association de plusieurs produits phytogéniques à vertus bénéfiques peut avoir une action longue durée et un effet continu qui couvre toute la période d’élevage du poulet de chair.
Effet des traitements sur la microflore intestinale
Lors de la recherche bactérienne des E. coli et Clostridies à partir de prélèvements iléaux et caecaux, le nombre exact de colonies n’a pas pu être déterminé. Ceci dit, nous avons opté pour le critère de présence ou d’absence de colonies (0).
Concernant E. coli, les 2 groupes ont démontré la présence de cette bactérie, que ce soit au niveau iléal ou caecal, durant toute la période d’élevage avec toujours une colonisation des cæca plus élevés que les iléons.
Il a été démontré bien auparavant que le thym inhibait la croissance de Salmonella typhimurium lorsqu'il est ajouté au substrat (Aktug et Karapinar, 1986). Comme les antibiotiques, les extraits de plantes ont prouvé lors de cet essai qu’ils pouvaient contrôler et limiter la croissance et la colonisation de nombreuses espèces pathogènes et non pathogènes de bactéries dans l'intestin.
En effet, les extraits végétaux démontrent clairement des propriétés antibactériennes, bien que les processus et mécanismes de ces dernières soient mal compris (Dorman et Deans, 2000).
Il a été démontré qu'aucune amélioration de la population microbienne n'est observée si la microflore est déjà en état d'équilibre. Par conséquent, si les oiseaux sont logés dans un état propre et sain et si les régimes sont hautement digestibles, il est possible que l'effet antimicrobien des produits phytogéniques ou bien des APC ne se manifeste pas (Schaedler, 1973). En effet, aucune amélioration n'est nécessaire si la microflore est déjà dans un état d'équilibre.
Pour la détection des clostridies, les analyses à J14 ont montré une absence totale de ces bactéries. A J24, on remarque qu’un individu de TENRA a développé une pullulation par les clostridies au niveau iléal, et que 3 autres du même groupe l’ont aussi développée à J34. Ceci dit, le milieu microbien des poulets de TENRA n’est pas conforme aux études bibliographiques qui indiquent qu’on retrouve les organismes anaérobies facultatifs (ex. E. coli) du jabot à l’iléon terminal, alors que les cæca contiennent en plus de ceux-là, des anaérobies strictes (ex les clostridies), ces dernières étant plus dominantes (Fuller, 1984). Ce résultat est en accord avec celui de Elmorabit (2018) où l’ajout de l’ENRAMYCINE à l’alimentation de la volaille a donné plus de sujets positifs comparé au résultat obtenu par l’ajout d’autres APC ou de produits naturels.
Des études in vitro ont démontré l'activité antimicrobienne contre des bactéries pathogènes de certaines plantes et de certains extraits de plantes comme l'origan (carvacrol), le thym (thymol), la cannelle (cinnamaldéhyde) et l'ail (allicine) (Kollanoor et al., 2010). D’autres études in vivo comparables, ont révélé des effets inhibiteurs contre des agents pathogènes tels que C. perfringens (Shane, 2006). Ceci concorde donc avec les résultats obtenus dans la présente étude pour TDUO dont les additifs sont les mêmes que ceux précités.
En plus de la stabilisation de la microflore intestinale, il a été démontré que l'inclusion de produits phytogéniques dans les régimes alimentaires réduit les métabolites microbiens toxiques dans l'intestin en raison de leurs propriétés antimicrobiennes directes sur diverses bactéries pathogènes, ce qui permet de soulager le défi intestinal et le stress immunitaire, améliorant ainsi les performances (Tiihonen et al, 2010).
Effet des traitements sur la coccidiose
Les individus de TDUO ont bénéficié d’un traitement 100% naturel, alliant produits phytogéniques à action antibactérienne et ceux à action antiparasitaire grâce à l’anticoccidien naturel que comporte le produit fait à base de thym, d’ail et d’origan.
D’ailleurs, les résultats obtenus ont montré un effet positif puisque les individus de ce groupe ont été indemnes de coccidiose à J34 tandis que ceux du TENRA, pour lequel un anticoccidien commercial a été utilisé, ont été infestés à cette même date.
Plusieurs études sont en accord avec ces résultats puisqu’ils ont démontré par test expérimental que certains additifs phytogéniques pour l'alimentation animale agissaient contre les espèces d'Eimeria (Hume et al, 2006). Des essais ont rapporté des résultats semblables suite à l’infection expérimentale par Eimeria tenella. En effet, les poulets recevant un produit alternatif à base d’origan présentaient des scores bas du point de vue excrétion des oocystes et score lésionnel intestinal (Christaki et al, 2004). De plus, l'ail et ses composés soufrés sont reconnus pour leurs vastes activités antimicrobiennes qui peuvent éliminer les effets négatifs des infections microbiennes. Dans ce sens, une étude in vitro a montré que l'allicine inhibe efficacement la sporulation de «E. tenella» (Alnassan et al, 2015).
D’autre part, des essais rapportent que l’absence de lésions de coccidiose serait liée sans doute au respect des conditions d’hygiène. En effet, le défaut d’hygiène est le facteur principal favorisant l’apparition de la coccidiose (Vercruysse, 1995). Ainsi, parmi tous les moyens visant à prévenir la coccidiose, la bonne pratique de l’hygiène demeure la mesure primordiale et indispensable à respecter.
Finalement, nous pouvons conclure que le produit phytogénique pourrait occuper une place pour la substitution des APC dans l’alimentation des volailles, et ceci grâce, à son pouvoir à mimer les mêmes niveaux de performances perçus dans le lot ayant reçu l’Enramycine, son aptitude à faire face à l’infestation par les coccidies, facteur prédisposant à la prolifération massive de C. perfringens responsable de l’entérite nécrotique, la capacité de ses individus à récupérer un bon état de santé au fil du temps ainsi que pour son amélioration de l’efficacité alimentaire. Néanmoins, d’autres types de protocoles sont à mener notamment dans des conditions de challenge, pour juger objectivement des produits alternatifs aux APC.
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