Principaux motifs de saisie du poulet de chair préparé au niveau d’un abattoir avicole
Résumé
Le but du présent travail est l'étude des principaux motifs de saisie de la volaille préparée au niveau d'un abattoir avicole par l'analyse macroscopique et microscopique des lésions rencontrées sur les carcasses et les abats. A l'examen ante-mortem, la volaille a été saisie sur pied pour cause de mort ou de mort apparente, de perturbation de l'état général, et d'anomalies liées à des conditions défectueuses de ramassage et de transport de la volaille. Les résultats obtenus à l'examen post-mortem font apparaître une multitude de motifs de saisie qui intéressent soit la totalité de la carcasse quand les lésions sont généralisées (infiltrationsséro-hémorragiques, cachexie, hydrohémie, couleur anormale, ecchymoses...) soit une partie de la carcasse lorsque ces lésions sont limitées. Le pourcentage des saisies par rapport au tonnage réalisé reste très faible et ne dépasse pas 1%.La quantité de viande saisie pour motifs d’accidents d'abattage et de préparation est très négligeable, ce qui apporte une preuve supplémentaire à la nécessité de préparer le poulet dans un abattoir avicole. L'étude microscopique réalisée sur les abats saisis révèle une dominance des péri- hépatites fibrineuses (soit 50% des foies saisis), des péricardites fibrineuses (66% des cœurs saisis) ainsi que des congestions pulmonaires et des broncho-pneumonies fibrino-suppurées (82% des poumons saisis).Les aspects lésionnels rencontrés pourraient être surtout associés à des entités pathologiques telles que la colibacillose et les salmonelloses.
Mots clés: Volaille, abattoir, motifs de saisie, lésions, étude macroscopique et microscopique
Introduction
L’aviculture marocaine a connu un développement considérable, grâce au secteur avicole industriel. Ce dernier fournit une quantité excessive en viandes blanches et œufs de consommation permettant de satisfaire les besoins en protéines animales pour une population à démographie galopante. Cependant, le manque d’organisation de la commercialisation représente aujourd’hui une réelle entrave à la poursuite du développement de ce secteur.
Aussi, après le souci d’augmentation quantitative de la production, la poursuite de l’évolution du secteur nécessite actuellement le rétablissement de la confiance au consommateur, par l’amélioration de la qualité des produits présentés. L’abattoir avicole industriel constitue le maillon primordial du développement qualitatif de la production avicole en viande. Cependant l’aviculture industrielle marocaine étant dans la périphérie des grandes villes se heurte à de nombreux problèmes entre autres les problèmes du transport et d’autres d’ordre sanitaire. La présente étude, réalisée au niveau d’un abattoir avicole agrée sur le plan sanitaire, s’inscrit dans ce cadre et contribue à l’étude des principaux motifs de saisie de la volaille par une analyse macroscopique et microscopique des lésions saisies.
Matériel et méthodes
L’objectif de la présente étude est la connaissance des principaux motifs de saisies des carcasses et des abats de la volaille préparée dans un abattoir avicole. A ce niveau, les prélèvements d’abats et/ou de parties de carcasses ont été effectués à raison de deux fois par semaine pendant une période de quatre mois. Les examens histo-pathologiques ont été réalisés au niveau du laboratoire d’Anatomie Pathologique de l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II.
Méthodologie de travail
Au niveau de l’abattoir
L’examen ante-mortem et post mortem de la volaille comme stipulé dans le dahir portant loi n°1-75-291 du 24 chaoual 1397 (8 octobre 1977) édictant des mesures relatives à l’inspection sanitaire et qualitative des animaux vivants et des denrées animales ou d’origine animale ont été réalisés au sein de l’abattoir. La réalisation de prélèvement a été effectuée à partir des abats (foies, cœurs et poumons) et des carcasses saisies. L’évaluation des pertes économiques liées aux saisies effectuées a été étudiée également.
Inspection ante-mortem
Il s’agit d’un examen clinique sur pied des oiseaux, il permet en particulier de rechercher les signes cliniques attribuables aux maladies virales et bactériennes les plus communément rencontrées (bronchite infectieuse, collibacillose, Salmonellose, etc..), les dommages de transport (luxations, fractures, ...), les animaux morts ou en état de mort apparente et les problèmes locomoteurs. A l’issu de cet examen, les animaux reconnus malades et ne donnant pas lieu à une saisie sur pied sont abattus séparément et en dernier lieu. Nous avons, à chaque fois, noté le nombre d’animaux saisis à l’état vivant.
Inspection post-mortem
Elle se fait en fin de la chaîne d’abattage, juste après l’étape de l’éviscération. Elle intéresse toutes les parties de la carcasse ainsi que les abats. Au titre de cette inspection, la surface des carcasses, les cavités et les viscères sont, en cas de doute, palpés et/ou incisés. Les modifications éventuelles de couleur, d’odeur, et de consistance de la viande et des viscères ont été également recherchées.
Prélèvements réalisés
Les parties de carcasses saisies ont été prélevées dans le but de confirmer la nature exacte des lésions. Les viscères qui présentent des lésions macroscopiques sont récupérés dans des flacons de formol tamponné à 10%, bien identifiés et acheminés au laboratoire. Une trentaine de visites ont été réalisées à l’abattoir, avec une moyenne de 20 prélèvements d’organes par visite. A chaque fois, l’étude microscopique s’est limitée à un seul prélèvement d’organe parmi plusieurs d’autres qui sont similaires de point de vue aspect macroscopique. Ainsi, les analyses ont intéressé 141 prélèvements dont la répartition figure dans le tableau 1.
Estimation des pertes économiques
L’estimation des pertes économiques engendrées par les saisies d’abats et de viande a été réalisée par consultation des registres de l’abattoir en comparant la quantité de saisies effectuées sur les viscères et/ou les carcasses au tonnage journalier réalisé.
Au niveau du laboratoire
Au niveau du laboratoire, il a été procédé comme suit:
• Description macroscopique des lésions existantes sur les prélèvements effectués et consignation sur une base de données;
• Préparation des coupes histologiques; les tissus fixés ont été préparés selon les techniques histologiques usuelles par inclusion à la paraffine. Des coupes de 5 µm ont été préparées, puis colorées par la technique Hématoxyline et Eosine;
• Lecture microscopique de ces coupes: les coupes colorées montées entre lame et lamelle ont été examinées au microscope optique en vue de la recherche de lésions microscopiques.
Résultats et discussion
Inspection ante-mortem
A la suite de cette inspection, la volaille reconnue apparemment saine est accrochée sur le convoyeur pour subir les autres opérations d’abattage et de préparation; alors que la volaille présentant des anomalies d’ordre sanitaire est saisie sur pied. Le pourcentage de ce dernier type de volaille représente moins de 1% du nombre total des animaux amenés pour abattage (Tableau 2).
Les motifs majeurs de saisie de la volaille en examen ante mortem sont les oiseaux morts où en état de mort apparente ainsi que ceux qui présentent une perturbation de leur état général caractérisé essentiellement par:
• Abattement et prostration,
• Tremblement, plumes hérissées,
• Muqueuses injectées,
• Crête violacée,
• Fractures récentes où anciennes.
A l’exception de quelques rares cas de maladies, la mortalité des animaux serait probablement liée à des conditions défectueuses au moment du ramassage et du transport de la volaille (caisses parfois surchargées, stress au moment du transport et du déchargement, conditions de chaleur et froid accablants).En effet, d’après Colin (1988), les conditions de ramassage et de transport influencent la qualité organoleptique et microbiologique de la viande de volaille. En effet, le stress imposé par le transport semble influencer l’apparition de viande de type exsudatif et par conséquent une coloration anormale des viandes blanches. Ce stress constitue également un facteur qui déclenche et favorise la dissémination de certains micro-organismes pathogènes tels que les salmonelles. Le ramassage de la volaille doit s’effectuer généralement la nuit afin d’éviter le stress d’une part, et d’obtenir un temps suffisamment long pour la mise à jeun des animaux (durant 8 à 10 heures avec maintien de l’abreuvement des volailles jusqu’à 1 heure avant le chargement des volailles) pour éviter la bactériémie digestive. Ce ramassage manuel doit être réalisé par un personnel plus au moins spécialisé dans ce type de travail. De même, les véhicules utilisés pour le transport doivent être conçus de manière à éviter de nuire à la santé et au bien-être des animaux. Ainsi, les cages doivent être bâchées en temps de pluie et aérées en périodes de chaleur. La volaille est acheminée parfois dans des cages en bois, surchargées (source d’étouffement), difficiles à nettoyer avec des ouvertures sources de nombreux hématomes, déboitages, fractures de l’épaule et de l’aile des volailles. Pour faire face à cette situation, il est préconisé d’utiliser des cages en plastiques, d’environ 1 m de long, 50 à 70 cm de large et 20 à 30 cm de hauteur. Ces cages sont conçues pour un nombre de 10 à 16 poulets par cage (Colin, 1988).
Inspection post-mortem
Cette inspection a été réalisée juste en fin de chaîne d’abattage et a porté sur l’examen de la carcasse et des viscères. Nous avons cherché l’existence de lésions externes causées par les traumatismes (fractures, ecchymoses...), des modifications organoleptiques concernant la couleur et l’odeur, et la présence éventuelle de maladies infectieuses(choléra aviaire ou pasteurellose, Newcastle, bronchite infectieuse, maladie de Marek…).D’autres altérations telles que la cachexie, l’ictère, l’ascite et l’hydrohémie ont fait l’objet de saisie pour aspect répugnant de la carcasse. La saisie a porté sur une partie de la carcasse lorsque celle-ci a montré des lésions limitées (infiltrations séro-hémorragiques, couleurs anormales localisées, fractures, ecchymoses ...), et a intéressé la totalité de la carcasse quand les lésions étaient très étendues ou généralisées. En absence de statistiques précises des saisies attribuées à tel ou à tel motif de saisie, la quantité d’abats et de viande saisie durant la période d’étude est présentée en fonction du volume de viande réalisée (Tableau 3). On remarque que les pourcentages des saisies restent faibles, avec un maximum de saisie de 9.10-3 et 2,6.10-3% respectivement pour la viande et les abats durant le mois de février. Pour le mois de mars la quantité de viande saisie varie d’un minimum de 4.10-3% à un maximum de 10-2% et oscille entre 1,7 et 3,3.10-3% pour les abats. Les valeurs enregistrées pour le mois d’avril varient de 4,4 à 6,5.10-3% pour la viande et de 1,2 à 3,6.10-3% pour les abats. Pour le mois de mai, ces valeurs sont de 4,4 à 7,8.10-3% pour la viande et de 2,6 à 3.10-3% pour les abats. Contrairement aux animaux de boucherie, les abats lésés de volaille sont saisis en totalité. Les viscères saisis ont été prélevés et ont fait l’objet d’une étude macroscopique et microscopique.
Les différentes opérations d’abattage influencent la qualité physique et organoleptique des carcasses. Ainsi, les carcasses peuvent être saisies suite à une saignée incomplète, à des brûlures consécutives à un mauvais échaudage (température élevée de l’eau), à des fractures des ailes ou au phénomène d’érosion causé par une étape défectueuse de plumaison (l’érosion dépend de nombreux paramètres dont l’âge des sujets, le réglage des machines, la vitesse linéaire du convoyeur et le rapport entre la vitesse du convoyeur et la vitesse de rotation des tambours). Dans l’abattoir concerné par la présente étude, la quantité des viandes saisies pour des accidents d’abattage et de préparation des carcasses reste négligeable par rapport au tonnage réalisé ce qui témoigne de conditions satisfaisantes de préparation. En effet, au niveau de cet abattoir, l’opération de saignée se fait de manière manuelle et aussi complète que possible avec respect du délai entre saignée et échaudage de 90 secondes. L’échaudage est réalisé dans de bonnes conditions d’hygiène et en respectant les normes de température (50 à 52oC/1 à 3 min) sauf dans de rares cas où nous avons observé quelques brûlures sur des carcasses. La même chose pour la plumaison, du fait que peu nombreuses sont les carcasses qui présentent des lésions dues à cette opération. Pour l’éviscération, le problème qui se pose parfois est celui des carcasses de petite taille. Pour ces dernières, l’enlèvement des viscères à l’aide de «cuillères» cause des déchirures de la carcasse.
Étude macroscopique
Les saisies ont porté principalement sur le foie, sur le poumon et sur le cœur. Le tableau 4 présente les pourcentages des lésions macroscopiques des foies, des cœurs et des poumons.
Au niveau du foie
Les lésions dominantes au niveau des foies sont représentées par les périhépatites fibrineuses, la congestion et la nécrose (Figure a). Les fausses membranes de fibrines couvrent généralement la totalité de l’organe. Des dépôts de fibrine associés sont observés sur d’autres organes, notamment au niveau du cœur, des intestins, des sacs aériens et de la cavité thoraco-abdominale (Figure a-2). Dans ce cas, la saisie intéresse la totalité de la carcasse. Des lésions de nécrose hépatique (Figure a-4) ont été fréquemment observées. Ces lésions nécrotiques sont soit limitées à des petits foyers à peine visibles macroscopiquement, soient étendues à de plus grandes zones hépatiques. Des foies hypertrophiés, friables de couleur pâle caractérisant une stéatose hépatique ont été également notées. Des hépatites congestives ou hémorragiques (Figure a-3), ou encore des foies verdâtres suite à l’accumulation de la bile sont rencontrées. Des abcès hépatiques de différentes tailles sont notés sur plusieurs foies. A l’exception des péri-hépatites fibrineuses, les autres lésions n’intéressent dans la majorité des cas que le parenchyme hépatique. La saisie reste ainsi limitée à l’organe lui-même.
Au niveau du cœur
La lésion principale rencontrée au niveau du cœur est la péricardite fibrineuse (Figure b-1). L’exsudat observé est soit séro-fibrineux ou fibrineux. Le péricarde est rugueux avec la présence de fausses membranes de fibrine qui couvrent la totalité du cœur. Comme précité, cette lésion est souvent généralisée à d’autres organes et la saisie intéresse la totalité de la carcasse (Figure b-2).De nombreux cœurs présentent un hydropéricarde. Le liquide péricardique est soit clair et séreux, soit séro-hémorragique. Dans la majorité des cas, seul le cœur est atteint et par conséquent, la saisie est limitée à cet organe.
Au niveau des poumons
Sur les 11 échantillons de poumons prélevés, 9 ont présenté des lésions de congestion (Figures c) associées pour certains avec de la suppuration en surface de coupe.
Étude microscopique
Au niveau hépatique
Les lésions microscopiques rencontrées au niveau du foie sont de plusieurs types(Figure d). Des foyers de nécrose (nécrose de coagulation dans la plus parts des cas) plus au moins étendus associés ou non à des phénomènes de dégénérescence cellulaire (dégénérescence vacuolaire dans la plupart des cas). Associés à ces lésions, on trouve généralement des infiltrats inflammatoires à cellules mononuclées (lymphocytes, monocytes, macrophages) ou à cellules polynucléés dominantes. Ces infiltrats ont pour la plupart des cas une localisation périportale (Figure d-1, d-2). Dans certains foies, les infiltrats sont situés dans tout le parenchyme hépatique. A côté des foyers de nécrose, la présence de nombreux micro-abcès hépatiques (infiltrats inflammatoires constitués principalement par des polynucléaires neutrophiles) a été parfois notée. Les lésions de dégénérescence et de nécrose cellulaires sont souvent associées à ces micro-abcès.
De même, il a été constaté que la périhépatite fibrineuse constitue la lésion la plus dominante caractérisée par un épaississement important de la capsule de Glisson. Cette dernière est infiltrée massivement par des cellules inflammatoires qui sont, soient dispersées, soient regroupées en nodules inflammatoires sous capsulaires dont certains présentent des centres nécrotiques entourés de macrophages et de cellules géantes. Dans certaines périhépatites, une organisation conjonctive de l’infiltrat avec formation de brides fibreuses (périhépatite villeuse) a été remarquée. Plusieurs cas de stéatose hépatique ont été trouvés associés ou non à des infiltrats inflammatoires. Des hépatites congestives voire même hémorragiques ont été également observées (Figures d-3).
Au niveau cardiaque
La principale lésion retrouvée est la péricardite fibrineuse représentée soit par un exsudat riche en cellules inflammatoires surtout des polynucléaires hétérophiles et de la fibrine, soit par des nodules inflammatoires au niveau de la séreuse. En fonction du stade lésionnel, nous avons rencontré six types de péricardites: Péricardites congestives, péricardites congestive-hémorragiques, péricardites fibrineuses, péricardites fibrineuses avec des nécroses cellulaires, péricardites muco-purulentes avec envahissement du péricarde par des polynucléaires hétérophiles et des péricardites fibreuses caractérisées par une organisation conjonctive de l’exsudat avec formation de brides fibreuses (péricardite villeuse). Dans certains cas, nous avons constaté la présence d’infiltrations interstitielles formées par des cellules inflammatoires de différents types. Ces infiltrats ne renferment parfois que des polynucléaires hétérophiles au niveau du myocarde (myocardite suppurée), associé à des phénomènes de nécrose dans certaines fibres myocardiques.
Au niveau pulmonaire
La principale lésion pulmonaire est représentée par la congestion associée souvent à des lésions d’œdème pulmonaire. Les capillaires sont dilatés et gorgés de sang; des cas de broncho-pneumonie exsudative suppurés ont été également trouvés. Ils sont caractérisés par la présence de bouchons muco-purulents dans la lumière des grosses bronches et des bronches collatérales et associés à des infiltrats inflammatoires à localisation interstitielle et péribronchique (Figures e-1-2-3-4).
La majorité des échantillons ont présenté des cas de périhépatites fibrineuses (soit 50% des échantillons) associées à des péricardites fibrineuses (65,6% des échantillons prélevés). Ces lésions sont fréquemment associées à des colibacilloses aviaires (Hammoudi, 2008; Bakkali Yakhlef, 2011, Zoubair et al., 2016). Ce résultat laisse supposer que les colibacilloses aviaires représentent l’entité pathologique la plus fréquente. En effet, les travaux réalisés par Amara (1996) ont montré que les colibacilloses aviaires sont devenues plus fréquentes et redoutables au Maroc par les dégâts qu’elles occasionnent. Ces infections à Escherichia coli se placent actuellement au premier rang des pathologies aviaires à l’échelle nationale et constituent un des motifs de saisie majeurs au niveau des abattoirs (Jaouzi et al., 2004; Cohen et Karib, 2006; Fatma et al., 2014). Les conditions d’élevage souvent défectueuses constituent la principale cause, surtout pour l’élevage de poulet de chair (El Houadfi et Zekhnini, 2009; Rahmatallah et al., 2014). L’évolution de ces complications colibacillaires n’est pas saisonnière, mais s’étale sur toute l’année. Les salmonelloses aviaires sont aussi incriminées. En effet, un grand nombre d’échantillons avait présenté des foies hypertrophiés avec des lésions nécrotiques plus au moins diffuses, des dégénérescences et des rétentions biliaires à l’origine d’une coloration verdâtre de l’organe (maladie du foie bronzé).
Une étude réalisée au Maroc par El Allaoui et al. (2017), sur la contamination des élevages de dinde de chair par Salmonella spp rapporte un taux important d’isolement (35%) et les sérotypes isolés sont alarmants. Au total, les auteurs ont identifié et dénombré 62 souches de Salmonella réparties en neuf sérotypes, à savoir: 21 S. kentucky (33,8%), 10 S. Parkroyal (16,3%), 6 S. saintpaul (9,6%), 7 S. agona (11,3%), 5 S. typhimurium (8%), 4 S. enteritidis (6,4%), 4 S. heidelberg (6,4%), 3 S. newport (4,8%) et 2 S. ruzizi (3,2%).
Les répercussions de l’infection de la volaille par les Salmonelles sur la santé publique suite à la consommation de produits avicoles sont importantes. En effet, le Réseau international des autorités de sécurité sanitaire des aliments (INFOSAN, 2008) a rapporté que l’usage abusif et l’administration non contrôlée des antibiotiques ont conduit à la sélection de bactéries résistantes. La résistance aux antibiotiques des entéropathogènes zoonotiques, principalement les salmonelles et les campylobacters, est d’autant plus dangereuse en termes de santé publique que ces bactéries peuvent être transmises à l’Homme par le biais de la chaîne alimentaire. La prise en compte des facteurs de risque potentiels de la contamination des élevages avicoles par les salmonelles permettra d’élaborer des stratégies efficaces de contrôle. Une autre partie des échantillons d’organes étudiés avait présentée des foies hypertrophiés, hémorragiques décolorés par endroit, ou bien piquetés de petits foyers nécrotiques grisâtres, avec la présence des exsudats fibrineux sur le foie et les séreuses péricardiques; et des poumons œdémateux ou hyperhémiques. Ces lésions accompagnent souvent l’ornithose psittacose ou la chlamydiose aviaire (Louis, 1984). L’hépatite vibrionique à Campylobacter fœtus pourrait aussi être incriminée du fait que certains échantillons ont présenté à la fois des cas d’hydropéricarde, des lésions de nécrose sur le cœur, avec des foies parfois verdâtres et des cas de péricardites. Les problèmes respiratoires pourraient être dus, en plus des conditions défectueuses de transport et de l’élevage, aux affections virales telle que la maladie de Newcastle caractérisée par des trachéites hémorragiques associées à de la congestion pulmonaire ;et la bronchite infectieuse, causée par un coronavirus et accompagnée par des lésions de trachéites et de congestion pulmonaires, l’ornithobactériose (Bouliane et al., 1993).Enfin, il faut bien préciser que malgré que le nombre d’échantillons réalisé soit réduit et que les prélèvements n’aient concernés qu’une période de 4 mois, les résultats obtenus constituent néanmoins une image de la situation sanitaire et hygiénique au niveau de l’abattoir étudié. Des études bactériologiques et virologiques seraient d’une grande utilité pour compléter cette étude et confirmer les suppositions établies et qui reposent sur l’étude lésionnelle macroscopique et histologique.
Analyse économique
Sachant que la quantité moyenne de viande saisie pendant les 32 visites effectuées est de 32 kg/jour et que la quantité moyenne d’abats saisie pendant la même période est de 14 kg/jour, et vue que le prix d’un kilogramme de viande préparée est de 27 dirhams (Dh) et celui d’abat est de 30 Dh; nous pouvons estimer les pertes économiques liées à la saisie, dans l’abattoir à une valeur de 1290 Dh/jour. De point de vue économique, le prix de la viande de volaille constitue un inconvénient majeur pour le consommateur marocain, surtout que ce dernier, prend la viande de volaille comme substitution à la viande rouge qui est aussi excessivement chère. Le prix d’abattage limite certains éleveurs de volailles à ne pas profiter des avantages et des services offerts par l’abattoir avicole agrée sur le plan sanitaire. Ce qui explique que plus de 90% du tonnage national en viande blanche est préparée et commercialisée quotidiennement dans des locaux insalubres. Ainsi, le nombre réduit d’abattoirs industriels est compensée par l’apparition de tueries «riachates» qui commercialisent simultanément et dans le même local les volailles vivantes et les viandes de volailles, ce qui est complètement interdit (Loi n°49-99, article 17). Ces dernières sont jugées non hygiéniques, et sont installées de manière anarchique, dans des zones à risque, pourvues de constructions ne répondant pas aux normes exigées, avec des équipements inadaptés et à haut risque de contamination, et avec un produit fini facilement altérable et fortement exposé aux contaminations. Un abattoir industriel avicole tel que celui de notre étude offre certainement plusieurs avantages, aussi bien d’ordre hygiénique qu’économique. Sur le plan hygiénique, il permet le contrôle de la salubrité des viandes, offrant ainsi au consommateur des viandes saines, sans risque et de qualité. Il permet aussi le diagnostic des maladies aviaires et par conséquent un contrôle rigoureux et une prophylaxie efficace au niveau des exploitations avicoles. Sur le plan économique il permet de régulariser l’approvisionnement du marché et de stabiliser les prix en atténuant les grandes fluctuations de l’offre et de la demande. L’abattoir constitue plus que jamais un maillon primordial du développement qualitatif de la production avicole.
Conclusion
Cette étude s’est intéressée à l’étude des principaux motifs de saisie de la volaille avec référence spéciale du poulet de chair préparée au niveau d’un abattoir avicole agrée sur le plan sanitaire par l’analyse macroscopique et histologique des lésions.
Au terme de ce travail, nous dégageons les conclusions suivantes:
• Le motif majeur de saisie du poulet de chair est représenté par des anomalies liées à des conditions défectueuses de ramassage et de transport des animaux à l’abattoir;
• Le pourcentage des volailles vivantes saisies est faible voir même négligeable;
• Le pourcentage des viandes et des abats saisis est aussi faible et ne dépasse pas 1% du tonnage réalisé;
• Les carcasses sont saisies en totalité pour causes de lésions généralisées (infiltrations séro-hémorragiques, cachexie, hydrohémie, couleurs anormales, ecchymoses ...) et font l’objet de saisies partielles lorsque la lésion est limitée;
• La quantité de viande saisie pour accidents d’abattage est négligeable, ce qui témoigne de conditions satisfaisantes de préparation;
• Au niveau des abats, les lésions dominantes sont représentées par des périhépatites fibrineuses associées à des péricardites fibrineuses. Ainsi que des cas de congestion pulmonaire.
Références
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