Inventaire des poissons capturés par la pêche aux claies au Sud-Ubangi (RD Congo)

Auteurs-es

  • Jean Bernard BOSANZA Institut Supérieur d’Etudes Agronomiques de Bokonzi, Gemena, Sud-Ubangi, RD Congo
  • Junior-Gauthier WEMBODINGA Département de Zootechnie, Faculté des Sciences Agronomiques, Université de Lodja, RD Congo
  • Nicodème NDOMBA Département de Zootechnie, Faculté des sciences Agronomiques, Institut Supérieur de Développement Rural de Kindu, RD Congo
  • Jean-Paul Koto-te-Nyiwa NGBOLUA Université de Gbado-Lite, Province du Nord-Ubangi, RD Congo
  • Nathan-Fernand NYONGOMBE Département de Zootechnie, Faculté des sciences Agronomiques, Université Pédagogique Nationale, Kinshasa, RD Congo

Résumé

La présente étude avait pour but d'inventorier les espèces de poissons capturés par la technique de pêche aux claies du type «Ndobo» en vue de détecter parmi ces espèces sauvages, et ce, à partir des données de la littérature sur leur comportement, celles ayant des potentialités piscicoles et ainsi proposer les stratégies de leur domestication. Il se dégage de cette étude que 19 espèces de poissons inventoriées sont réparties en 13 genres et 10 familles dont la plus représentée est celle de Claridae avec 31,6% d'espèces. Seulement 6 espèces (soit 31,6%) font déjà l’objet d’élevage parmi lesquelles, du point de vue économique, 3 espèces sont couramment élevées en RDC à savoir Parachanna obscura, P. insignis et Clarias gariepinus. Les observations morphologiques et les appréciations organoleptiques poussent à considérer que trois espèces sont potentiellement piscicoles à savoir Clariallabes sp. et deux autres du genre Clarias, communément appelées «ngolo» (en lingala) et spécifiquement Limongo et Okolo (en Boba). D'où la nécessité de procéder à leur domestication et élevage en étang en vue d'étudier leurs performances zootechniques et économiques. Ceci pourrait permettre d'enrichir localement l'ichtyofaune piscicole en nouvelles espèces sauvages et ainsi diversifier la production.

Mots clés: Pêche, claies, Ndobo, Poisson, Bomboma

Téléchargements

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INTRODUCTION

Les activités anthropiques, les engins de pêche utilisés et la pression de plus en plus croissante, poussent à entreprendre des études beaucoup plus poussées pour sauvegarder les habitats des poissons et de les conserver pour les générations avenirs. Les études antérieures ont démontré que l’expansion démographique des années avenir et les projections alimentaires sont controversées de façon à présumer que la terre ferme ne saura nourrir le monde, il faudrait recourir à la mer, aux océans, fleuves, et autres cours d’eau pour subvenir aux besoins de la population mondiale (Mujinga et al., 2009; Raven et al., 2009). Le poisson est une source des nutriments complets par excellence. Avec des acides aminés essentiels et des acides gras polyinsaturés, ainsi que des vitamines et oligoéléments; il ne contient pas du cholestérol. Cette réalité est perçue par des communautés riveraines de façon empirique depuis des générations. Ceci explique bien l’importance culturelle de la pêche (Mamonekene et Musibono, 2010). Ceci étant, les poissons constituent des sources non négligeables de protéines (au même titre que la viande), de revenus et de travail soutenant ainsi les ménages et faisant partie de nœuds d’éclosion du développement (Kpogue et al., 2013). Ils sont une opportunité d’affaires tant pour la pêche que pour l’aquaculture et l’industrie y relative (Bosanza et al., 2019).

En effet, l’explosion démographique croissante occasionne la surexploitation des forêts et exerce une pression sur les écosystèmes naturels et la biodiversité de la République Démocratique du Congo. Dans le cas particulier des écosystèmes aquatiques, la raréfaction des poissons et la concurrence ont exacerbé les conflits inter-ethniques dans certaines provinces et les méthodes artisanales de pêche, séculairement pratiquées, sont loin de pallier à cette situation d’insuffisance alimentaire en produits halieutiques (Bosanza et al., 2017; Bosanza et al., 2018).

A ce jour, elle reste essentiellement artisanale, sans véritable gouvernance et orientée vers la cueillette (Minader, 2010; Zanga, 2013). En plus, 80% des stocks mondiaux des poissons sont maintenant considérés comme pleinement exploités, surexploités ou en voie de reconstitution. La pêche traditionnelle a toujours été une activité de cueillette ou on prélève du poisson sans contribuer à sa régénération. Par conséquent, il est très peu probable que la pêche sera capable de fournir plus de poissons à l’avenir qu’aujourd’hui. L’aquaculture apparaît donc comme la seule solution pour augmenter la disponibilité en produits aquatiques (Teletchea, 2015) et la pisciculture ou l’élevage des poissons apparaît aujourd’hui la solution pour tirer une meilleure partie de notre terre et de notre eau.

La République Démocratique du Congo est dotée de nombreux plans d’eau d’une superficie de 86 000 km2, soit 3,5% du territoire national. Le réseau hydrographique congolais est constitué d’un énorme réseau fluvial, des plaines inondées et des grands lacs ainsi que d’une façade maritime. Grâce à la densité de son réseau hydrographique et l’abondance de ses ressources halieutiques très diversifiées, la République Démocratique du Congo offre d’énormes possibilités de développement de la pêche (Minader, 2010).

Cependant, les statistiques montrent que la République Démocratique du Congo a beaucoup régressé du point de vue de ses performances productives jusqu’à ne plus être capable de satisfaire à la demande alimentaire. Et pourtant, elle dispose d’un vaste réseau hydrographique: ses eaux intérieures – rivières et lacs – permettraient la production annuelle de plus de 700 000 tonnes de poissons alors que la production annuelle est estimée à moins de 200 000 tonnes (MINADER, 2010). La pêche est principalement concentrée sur quelques espèces de poissons qui représentent un pourcentage important du poids total de la capture. Plus de 90% de la production sont l’œuvre des pêcheurs artisanaux qui récoltent les poissons sans respect des normes requises (MECNDD, 2016).

Même si la chasse et la pêche ne fournissent plus suffisamment à cause sans doute de la dégradation de l’environnement consécutive aux méthodes traditionnelles abusives d’exploitation des forêts et des cours d’eaux, elles demeurent les principales sources des produits alimentaires d’origine animale dans la plupart de provinces du pays. Certains chercheurs affirment même que les protéines d’origine animale proviennent essentiellement de la pêche (50%) et de la chasse (25%) et secondairement des insectes (10%) et de l’élevage (15%) (Okitayela, 2010). La pêche constitue un moyen de subsistance pour une bonne partie de la population congolaise.

Ainsi, bien que saisonnière et autrefois considérée comme une pêche alimentaire ou de subsistance, la pêche aux claies appelée localement «Ndobo», qualifiée d’artisanale suite à sa technologie moins développée, fait aujourd’hui l’objet d’insertion dans le circuit de commercialisation des poissons à l’échelle tant nationale qu’internationale.

En outre, même si la République Démocratique du Congo est l’un des réservoirs mondiaux de la biodiversité tant floristique que faunique (PFBC, 2005), l’aquaculture, encore timide, ne s’appuie que sur quelques espèces des Cichlidés (Tilapias), des Claridés (Silures ou poissons-chats) et des Channidés du genre Parachanna (Mongusu en lingala ou poissons serpents en français) (Mamonekene & Musibono, 2010; Musibono, 2013). Cette aquaculture repose principalement sur la pisciculture familiale de subsistance dans laquelle la culture de Tilapias et de poissons chats est prépondérante malgré les potentialités d’élevage d’autres espèces aquacoles (MINADER, 2010; ANAPI, sd). A titre illustratif, la plupart des pisciculteurs identifiés à Kindu et ses environs ne sont axés que sur la Tilapiaculture et un peu sur la Clariaculture. Or, d’autres espèces comme celles des genres Synodontis et Distichodus sont disponibles mais ne reçoivent pas assez d’attention de la part des éleveurs bien qu’ils peuvent diversifier les espèces piscicoles pour une gestion durable des écosystèmes aquatiques.

Face aux préoccupations précédentes et considérant que la plupart des espèces de poissons élevés au monde sont encore très proches de l’état sauvage (Vandeputte et Prunet, 2002), il devient impérieux de rechercher des solutions durables pour améliorer localement la production en poisson et essayer tant soit peu de pérenniser et d’accroître celles des espèces ayant une potentialité piscicole. En outre, il est impossible de sauvegarder une biodiversité si elle n’est pas connue.

C’est dans cette optique que cette étude, menée dans le secteur de Bomboma, cherche à inventorier les espèces de poissons capturés par ladite technique de pêche en vue de détecter, à partir des données de la littérature sur le comportement des poissons, celles à potentialité piscicole et ainsi proposer les stratégies de leur domestication.

Pour ce faire, il importe de répondre aux questions suivantes: (a) quelles sont les espèces de poissons capturées par ladite technique de pêche? (b) parmi ces espèces quelles sont celles qui constituent déjà l’ichtyo faune d’élevage dans la contrée et à potentialité piscicoles?

Tacitement, les espèces de poissons capturées par ladite technique de pêche sont celles reprises dans l’Atlas des poissons d’eau douce du bassin du Congo (Mamonekene et Musibono, 2010). En outre la timidité de la pisciculture en RD Congo nous pousserait à considérer que les pisciculteurs de la contrée élèvent les mêmes espèces de poissons que celles données par Musibono (2013).

Considérant que les poissons constituent une ressource naturelle renouvelable (Ngoy et al., 2020) et dans le souci de promouvoir localement la production durable des poissons, l’objectif général de cette étude est de fournir les données sur les ressources locales en poissons sauvages capturés et domesticables.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Localisation

Le Secteur de Bomboma qui constitue le milieu où cette étude a été réalisée est situé dans le territoire de Kungu (figure 1), province de Sud-Ubangi en République Démocratique du Congo.

Le site d’étude est localisé dans le marché primaire de poisson se trouvant dans le groupement de Motuba.

Les coordonnées GPS indiquent que ce milieu se trouve à 2°20’ et 3°15’ de latitude Nord, 18°40’ de Longitude Est et 350m d’altitude.

Selon le Ministère du plan (2005), le climat de cette contrée est en général tropical du type AW suivant la classification de Köppen; particulièrement une zone climatique du type AW3, caractérisée par une saison sèche qui dure 70 à 80 jours. La pluviométrie annuelle est de 1800 mm. La température est de 20,7°C minimum et 30,7°C maximum, la moyenne journalière étant de 25,7°C. L’humidité relative est de 87%. Les moyennes annuelles des températures maxima journalières se situent aux environs de 30°C.

Les sols appartiennent au type des ferrasols sur roches non définies couvrant la moitié du Nord des province de l’Ubangi et de la Mongala. Ces sols sont des sables limono-argileux et des limons sableux.

Comme le site est situé dans la cuvette centrale, la végétation forme des forêts ombrophiles sempervirentes, caractérisées par la diversité de leurs essences, la densité de leurs peuplements, la dimension de leurs arbres et l’enchevêtrement des lianes. Les plus rencontrées sont celles à Gilbertiodendron dewevrei et à Brachystegia laurentii.

Concernant son hydrographie, le site d’étude étant situé dans le territoire de Kungu, ce dernier est traversé par des sources d’eau ayant donné naissance à la rivière Moanda, une partie des branches de la rivière Ngiri. Parmi les ruisseaux, citons: Mokeli, Molombe et Lukute, affluents de la Mbetuma, Mwenze, Mola, Ngombo, Bolola, Molombe, Molongolongo, Likoko, Motenano, Mungo, Liboko, Bwalanga, Likunda, Mambumbu, Mikalambanga, Mososombo, Ndongi, Ligiligiri, Sabasaba, Sosa, Limbiko, Nkoko, Ligbodu, Likoba, Lubu, Nangusu et Napokolo. Bien que situé en région de terre ferme, le secteur Bomboma renferme des chenaux dans ses parties marécageuses. Ces chenaux convergent principalement vers le groupement Ebuku du secteur Moanda, se prolongeant jusqu’à la rivière Ngiri (Nagifi et al., 2013).

Matériel

L’étude focalisée sur les poissons sauvages, a eu pour dispositif, la pêche aux claies d’appellation locale «Ndobo» ayant constitué le principal matériel non biologique de cette étude. Quant au matériel biologique, il est constitué des acteurs de la filière halieutique (en l’occurrence les pêcheurs et les distributeurs des poissons) et des différentes espèces de poissons capturées et vendues dans le marché primaire ciblé par l’étude.

En effet, la technique de la pêche du type «Ndobo» (appellation en langue vernaculaire) est une sorte de la pêche aux claies, pratiquée dans la contrée et dont les spécialistes se trouvent principalement dans le groupement de Motuba situé dans le secteur de Bomboma. Cette technique consiste à la construction d’un enclos en forme de guitare, muni de deux ouvertures en aval pour faciliter l’entrée des poissons. La partie en aval de la structure est prolongée d’un col étroit dont l’extrémité rétrécis est bien aménagée pour servir de pêcherie. On place dans cette partie extrême, appelée localement «Nyango», une sorte de leurre constituée d’un tas de fines racines d’arbre pour permettre aux poissons de se concentrer à cet endroit. De part et d’autre de sa base au niveau de sa jonction avec le reste de la structure se trouve une ouverture pour permettre l’entrée des poissons. Ces deux ouvertures sont munies des dispositifs particuliers qui empêchent la sortie des poissons qui y entrent. La nuit, lorsque le pêcheur constate qu’il y a des poissons dans l’enceinte de l’enclos, il fait glisser les dispositifs se trouvant dans chacune des ouvertures pour les fermer complètement et ainsi empêcher les poissons de sortir.

La récolte des poissons se fait la journée à l’endroit le moins profond de l’enceinte où sont érigés d’autres dispositifs qui facilitent la capture des poissons. On utilise avant tout le javelot pour tuer les serpents et l’épuisette pour récolter les poissons. Cette technique de pêche couvre une période d’environ 6 mois, allant de juin à décembre suivant la chronologie des activités reprises dans le tableau 1.

Comme dans la contrée, il n’existe pas d’infrastructures modernes de transformation ni de conservation, la conservation des poissons vivants dans les récipients contenant l’eau est pratiquée sur les sites mêmes de production; ces poissons sont vendus sur place au niveau de campements ou acheminés dans le marché proche. Quant aux poissons destinés à la commercialisation dans les marchés éloignés, le fumage est le mode de conservation le plus pratiqué.

Pour réaliser ce travail, la démarche méthodologique a consisté en la technique documentaire, en l’enquête par questionnaire complétée par l’observation in situ.

Collecte des données

La technique documentaire a consisté à parcourir les documentations disponibles se rapportant à l’ichtyologie : les indicateurs sur les poissons de la République Démocratique du Congo pour recueillir les informations pertinentes permettant l’identification des espèces de poissons vendues aux marchés ciblés par cette étude.

L’enquête face-à-face, dans les sites retenus a consisté à interviewer un échantillon des pêcheurs et vendeurs des poissons en procédant par la technique de l’échantillonnage par convenance et en boule de neige c’est-à-dire la sélection des individus est d’abord déterminée par la facilité d’accès, leur disponibilité et leur coopération; ensuite, la rencontre du premier enquêté nous amener à rencontrer d’autres jusqu’à atteindre la taille de l’échantillon voulu (KINKELA, 2013). Nous avons choisi la méthode d’enquête par échantillonnage non probabiliste en faisant appel à des répondants volontaires suite au manque d’une base de sondage sure. Elle nous a servi à sélectionner des unités pour des interviews approfondies.

Pour faciliter les interviews, en fonction de types d’acteurs ciblés par cette étude (pêcheurs et vendeurs des poissons), deux questionnaires préalablement établis (renfermant les différentes variables sur les caractéristiques des poissons) ont été administrés aux enquêtés sélectionnés par interview face à face enquêteur-enquêté.

Enfin, l’identification des poissons à l’espèce nécessite presque toujours la capture et la manipulation des spécimens. La clé est basée sur les critères morphologiques les plus évidents possibles et vise l’identification rapide des spécimens (DESROCHES, 2010). Pour cette étude, la technique a consisté, d’une part à collecter sur terrain, les spécimens vivants des espèces ichtyologiques citées par les enquêtés, et d’autre part à identifier systématiquement ces espèces par l’observation directe des photographies proposées dans la littérature sur leurs caractéristiques morphologiques et phénotypiques servant de clés d’identification (Teugels et Adriaens, 2003; Musibono, 2013; MRAC, 2014; Kowozogono et al., 2021).

Traitement statistique des données

Pour les espèces de poissons capturés, le répertoire systématique des poissons suivant la classification binominale de Liné (familles, genres et espèces) en y ajoutant les noms vernaculaires donnés par les enquêtés), leur disponibilité leur appréciation organoleptique et leur taille. L’abondance relative d’une famille correspond au nombre d’espèces d’une même famille, pondéré au nombre total d’espèces inventoriées. Elle a été déterminée à l’aide de la formule ci-après:

Abondance relative (%)=(Nombre d'espèces d'une même famille)/(Nombre total d'espèces identifiées)×100

La compilation des informations recueillies a été faite selon la structuration de la fiche du questionnaire d’enquête et présentées sous forme des fréquences absolues. Grâce au tableur Excel, les résultats sur les fréquences relatives des modalités de différentes variables d’étude ont été déterminés sous forme de pourcentage selon la formule suivante:

Fréquence relative (%)= fréquence absolue/taille de l'échantillon × 100

Des graphiques pour l’illustration de certaines variables sont générés par le tableur Microsoft Excel (xlsx).

RÉSULTATS ET DISCUSSION

Le répertoire des espèces de poissons capturées et identifiées aux lieux de la pêche et dans les marchés primaires où elles sont vendues ainsi que les indicateurs relatifs à leur disponibilité et leur appréciation sont présentés dans le tableau 2.

Au regard de résultat du tableau 2, il se dégage au total 19 espèces réparties en 13 genres, 10 familles et 6 ordres selon la clé d’identification donnée par Teugels et Adriaens, (2003) et reprise par Musibono (2013).

Au regard des résultats consignés dans la figure 2a, nous remarquons que l’ordre de Perciformes est le mieux représenté (soit 40% de familles). Il compte quatre familles dont Anabatidae, Channidae, Cichlidae et Pantodontidae. L’ordre des Osteoglossiformes (soit 20% de familles) compte deux familles, à savoir: la famille de Mormyridae et la famille de Notopteridae. Les autres ordres (Cypriniforme, Lepidosereniforme, Polypteriforme et Siluriforme) ont une famille chacun (soit 10% de familles).

A la lecture des résultats repris dans la figure 2b, fort est de constater que la famille de Claridae est la mieux représentée avec cinq espèces (soit 31,6 % d’espèces) dont C. buthypogon, C. gariepinus, C. sp. et C. sp., C. sp. Les familles d’Anabatidae, Channidae, Cichlidae et Notopteridae sont chacune représentée par deux espèces (soit 10,5% d’espèces). Les autres familles comptent chacune une espèce (soit 5,3% d’espèces).

Au regard de ces résultats, la supériorité spécifique des Clarodae (soit 31,6%) corrobore les indications antérieures selon lesquelles la proportion élevée de Siliuriformes seraient due à leur abondance dans le plan d’eau africain d’une manière générale et dans celui du bassin du Congo en particulier où ils prédominent; à titre illustratif avec 28,6% de la richesse ichtyologique de Pool Malebo (Fleuve Congo) suivi des Osteoglossiformes (19,8%) (Kowzogono et al., 2022).

Wembodinga et al., (2013 et 2014) faisant un aperçu sur l’ichtyofaune de la province de Sankuru constatent que dans la rivière Lokenye, la famille de Clariidae compte deux genres dont Clariallabes et Clarias, et trois genres dont Clariallabes, Channallabes et Clarias dans la rivière Lomami. Ce dernier genre compte dans le deux écosystèmes aquatiques quatre espèces dont C. buthypogon, C. gariepinus, C. platycephalus et C. angolensis.

Nyongombe (1993) travaillant sur les poissons de la rivière Masendula dans la région de Kisangani, note une nette plebiscite de la famille de Clariidae dans laquelle, il identifie 3 genres: Channallabes, Clariallabes et Clarias. C’est dans ce dernier genre qu’il récence 7 espèces parmi lesquelles, nous citons: Clarias pachynema, Clarias buthypogon, Clarias angolensis, Clarias gabonensis, Clarias platycephalus, Clarias camerunensis et Clarias gariepinus.

En rapport avec les données du tableau 1, l’analyse de la littérature sur la pisciculture a révélé que 6 espèces (soit 31,6%) font déjà l’objet d’élevage parmi lesquelles, du point de vue économique, 3 espèces sont couramment élevées en République Démocratique du Congo à savoir Parachanna obscura (Gunther, 1861), P. insignis (Sauvage, 1884) et Clarias gariepinus). Ce qui traduit la timidité de l’aquaculture congolaise qui ne s’appuie que sur quelques espèces des Cichlidae (Tilapias), des Claridae (silures ou poissons-chats) et des Channidae du genre Parachanna (poissons serpents) (Musibono, 2013).

Parmi ces 19 espèces répertoriées, 9 (soit 47,4%) sont très appréciées, 6 (soit 31,6%) sont appréciés, 3 (soit 15,8%) sont moins appréciées par les consommateurs et une autre restante (soit 5,3%) est indifférente. Cinq de ces 9 espèces très appréciées ne font pas encore l’objet d’élevage et parmi lesquelles 3 (Figure 3) présentent des intérêts piscicoles eu égard à leur morphologie.

Ainsi, considérant d’une part que, selon le type d’équipement de pêche utilisé et le lieu de capture, la pêche exerce des pressions de sélections sur la taille, l’âge et la maturité des poissons conduisant à l’épuisement des ressources halieutiques avec de nombreux impacts environnementaux (Kurien, 2000) et d’autre part en se focalisant sur les espèces non encore domestiquées: leurs observations morphologiques, leurs appréciations organoleptiques (allant de 63,6 à 98,3% de citations) et leurs disponibilités (allant de 14,3 à 42,2% de citations); trois espèces de la famille des claridae (Figure 3) sont potentiellement piscicoles dont l’une est du genre Clariallabes en l’occurrence Clariallabes sp. (Motepa en Boba ou Mongbangele en Lingala) et deux autres sont du genre Clarias à savoir C. sp. (Okolo en Boba ou Ngolo en Lingala) et C. sp. (Limongo en Boba ou Ngolo en Lingala). D’où la nécessité de procéder à leur domestication et élevage en étang en vue d’étudier leurs performances zootechniques et économiques. Ce qui pourrait permettre de d’enrichir localement l’ichtyofaune piscicole en nouvelles espèces sauvages et ainsi diversifier la production.

La proposition de ces trois espèces pour la pisciculture est appuyée d’une part par le fait qu’elles comptent parmi celles très appréciées par les consommateurs et d’autre part par les bons résultats obtenus par nombreux chercheurs dans l’élevage d’autres espèces de Claridae notamment Clarias gariepinus et C. ngamensis en Afrique (Viveen et al., 1987; Lacroix, 2004; Sangawa, 2020; Mfwana et al., 2016; Ipungu et al. (2019).

En effet, nombreux études se sont focalisées sur C. gariepinus, espèce d’eau douce à tendance carnivore (tendance alimentaire à teneur élevée en protéines, accepte les aliments artificiels ainsi que les vers, les asticots …). Il est doté d’un système de respiration aérienne qui lui permet de survivre dans une eau très pauvre en oxygène et il résiste bien aux manipulations (Mamonekene et Musibono, 2010; Musibono, 2013; Pruvot, 2018). Sa croissance est exceptionnelle: 3 g/individu/jour et plus; sa taille maximale observée à Bouaké est de 1,2 mètres (Lacroix, 2004). Selon Ipungu et al. (2019), au bout de 5 mois d’étude, avec des individus ayant un poids initial de 30 g et 22 cm de longueur corporel pour C. gariepinus et 30 g de poids initial et 20 cm de longueur corporel pour C. ngamensis ils ont obtenu un poids moyen de 82 g et 29 cm pour C. gariepinus et 60 g et 25 cm pour C. ngamensis. Selon Viveen et al. (1987), en récoltant le poisson 24 semaines après la mise en charge d’un are d’étang d’eau stagnante avec des 1000 C. gariepinus (de 1-3 g), il faut s’attendre aux résultats suivants: poids moyen 200 g, taux de survie 50% et production de 100 kg/are avec un quotient nutritif relatif d’environ 1,4. La même source indique que dans l’élevage mixte poisson-chat et tilapias avec complément alimentaire à base de tourteaux de coton, la récolte effectuée 25 semaines après la mise en charge d’un are d’étang d’eau stagnante avec 300 C. gariepinus (de 1-3 g) et 200 Oreochromis niloticus (de 5-15 g), a donné pour le poisson-chat: un poids moyen de 185 g, un taux de survie 65% et un production 36 kg/are; pour le Tilapia: un poids moyen de 80 g, taux de survie 103% (ce qui indique que le poisson-chat n’a pu contrôler complètement la reproduction du tilapia) et une production de 16,5 kg/are.

CONCLUSION

Cette étude, menée dans le secteur de Bomboma, cherchait à inventorier les espèces de poissons capturées par la pêche aux claies du type «ndobo» en vue de détecter celles à potentialité piscicole dans le souci de promouvoir localement la production durable des poissons en fournissant les données sur les ressources locales en poissons sauvages capturés et domesticables. Les résultats obtenus indiquent que seulement 6 sur 19 espèces de poissons identifiées (soit 31,6%) font déjà l’objet d’élevage parmi lesquelles 3 sont couramment élevées en République Démocratique du Congo, en l’occurrence Parachanna obscura (Gunther, 1861), P. insignis (Sauvage, 1884) et Clarias gariepinus (Buchell, 1822). Les observations morphologiques, les indicateurs d’appréciations organoleptiques et de la disponibilité poussent à considérer que trois espèces sont potentiellement piscicoles dont l’une est du genre Clariallabes sp. (Motepa en Boba ou Mongbangele en Lingala) et deux autres – à identifier binominalement – sont du genre Clarias à savoir C. sp. (Limongo en Boba ou Ngolo en Lingala), et C. sp. (Okolo en Boba ou Ngolo en Lingala). D’où la nécessité de procéder à leur domestication et élevage en étang en vue d’étudier leurs performances zootechniques et économiques. Ce qui pourrait permettre d’enrichir localement l’ichtyofaune piscicole en nouvelles espèces sauvages et ainsi diversifier la production.

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Publié-e

15-03-2023

Numéro

Rubrique

Pêche et Halieutique