Diversité des méthodes d’effarouchement des oiseaux dans les agroécosystèmes du Bénin

Auteurs-es

  • Hippolyte AGOSSOU Laboratoire d’Ecologie, de Botanique et de Biologie végétale, Université de Parakou, Bénin
  • Gilles NAGO Laboratoire d’Ecologie, de Botanique et de Biologie végétale, Université de Parakou, Bénin
  • Toussaint LOUGBEGNON Université Nationale d’Agriculture de Porto-Novo, Bénin
  • Samadori Honoré BIAOU Laboratoire d’Ecologie, de Botanique et de Biologie végétale, Université de Parakou, Bénin

Résumé

Les conflits entre l’Homme et la faune sont accentués le plus souvent par les dommages causés aux cultures. C’est bien le cas de l’avifaune qui en groupe de déprédateur arrive à réduire considérablement les récoltes. Cette étude vise à connaître les moyens utilisés par les agriculteurs pour protéger les cultures des activités déprédatrices des oiseaux granivores et frugivores dans les agroécosystèmes du Bénin. La collecte des données a été réalisée auprès de 713 agriculteurs dans sept communes représentant chacune une zone agro-écologique. Les résultats ont montré une diversité de méthodes utilisées dans les différentes zones sous diverses formes. De plus, il existe une forte corrélation entre les cultures et les techniques d’effarouchement des oiseaux. Cette étude a également révélé que les populations de certaines zones utilisent plusieurs techniques d’effarouchement de la faune ornithologique déprédatrice des cultures dont bon nombre ne sont pas connues. C’est le cas de la coupe des épis à Boukoumbé et quelques techniques traditionnelles plus pratiquées dans la région de Bantè.

Mots clés: Diversité, Méthodes d’effarouchements, oiseaux, Agroécosystème, Bénin

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Introduction

La lutte contre les oiseaux déprédateurs des cultures est l’une des préoccupations auxquelles font face les agriculteurs en général et ceux des pays en développement en particulier. Cette lutte contre les oiseaux déprédateurs a toujours été le grand défi de tous les temps (Botha et al., 2018) puisque les grandes pertes de cultures sont occasionnées par les ravageurs (rongeurs, les oiseaux, les nématodes). Ainsi, plusieurs producteurs pour pallier aux attaques des ravageurs installent ont recours aux techniques de lutte telle que le gardiennage des cultures, le lancer des projectiles, l’usage des répulsifs auditifs et visuels, les pièges mécaniques (Sikirou et al., 2018), la coupe des perchoirs à proximité des cultures, la destruction des nids de quelea (Buba et al., 2013) sont des techniques traditionnelles utilisées par les producteurs. La gestion de Quelea quelea en tant qu’oiseau nuisible dans l'État de Borno a posé problème, prenant en compte les aspects liés à la santé humaine et d’autres pertes économiques (Buba et al., 2013). Selon ces mêmes auteurs, l’utilisation des répulsifs auditifs, visuels et le piégeage restent les techniques les plus efficaces de contrôle des oiseaux des champs. Or, l’usage des pièges mécaniques et des avicides détruit la faune ornithologique tout en le débarrassant des espèces du sol indispensable à l’élimination des insectes nuisibles ou non peuplant la flore édaphique. Buba et al., (2013) et Ezealor (1994) ont signalés que l’utilisation d’avicides pour lutter contre le Quelea à bec rouge affecte d’autres espèces d’oiseaux et d’autres biotes de la région. C’est à juste titre que Bouet et al., (2017) proposent l’usage des répulsifs à base d’anthranilate de méthyl permettant de réduire de 45 à 80 % les pertes causées par les oiseaux tout en les préservant. Les travaux effectués par Elliott et Bright (2007) ont révélé que les techniques d’effarouchement telles que l’utilisation des cris humains, l’emploi de toutes formes de bruits, des projectiles lancés aux oiseaux et des cordes avec des canettes et bouteilles en rotation dans les champs sont traditionnellement utilisées partout en Afrique, ce qui permet d’éloigner les oiseaux des cultures sans leur créer de dommages. Pour Ruelle et Bruggers (1982), deux approches générales sont utilisées dans les pays africains pour réduire les pertes de céréales occasionnées par les oiseaux. Ainsi, les techniques de suppression de la population, notamment les applications avicidiques aériennes et terrestres, les explosifs, la destruction manuelle des nids et des techniques de protection des cultures en l'occurrence les effaroucheurs, les répulsifs chimiques, les filets d’exclusion et les modifications des pratiques agricoles. Au-delà de ces techniques, les agriculteurs Philippins s’adonnent à des rituels traditionnels visant l’effarouchement de la faune aviaire et qui contribueraient indirectement à la protection des cultures (Savary et al., 2000). Elliott et Bright (2007) notent l’usage de fétiches par les producteurs nigérians. La délicatesse de ces deux dernières méthodes est telle que les producteurs exigent un certain nombre de conditions afin que ces différentes techniques soient actives; pas de femme urinant dans le champ ni celle traversant le domaine, pas de coupe de bois ni de cris dans le domaine (Elliott et Bright., 2007). Les travaux menés par Villeneuve (2013) sur les techniques d’effarouchement ont permis de reconnaître l’efficacité de 57 % des effaroucheurs sonores utilisant les cris de détresse contre 68 % des utilisateurs des canons.

Caractériser les techniques de lutte anti-aviaire tout en relevant leur efficacité dans les agro-écosystèmes permettra de préserver la faune ornithologique des agro-écosystèmes par ricochet les pertes enregistrées au niveau des cultures. Pour y parvenir, cette étude se fixe comme objectif de répertorier les différentes techniques de lutte anti-aviaire puis d’analyser la relation entre la diversité des méthodes de lutte anti-aviaire et les caractéristiques socio-démographiques. Elle vise donc à élucider l’influence des caractéristiques socio-démographiques sur la diversité des méthodes de lutte anti-aviaire.

Matériel et méthodes

L’aire d’étude

La République du Bénin couvre 114 763 km² et est située entre 6°30’ et 12°30’ de latitude Nord et 1° et 3°40’ de longitude Est (Adam et Boko, 1993; Yabi et al, 2018). Elle est bordée au nord par les républiques du Niger et du Burkina Faso, au sud par l’océan Atlantique, à l’ouest par la République du Togo et à l’est par la République du Nigeria. Au cours des 25 dernières années, une méthode de zones agroécologiques (ZAE) a été développée, qui fournit un cadre standardisé pour caractériser les conditions climatiques, pédologiques et foncières pertinentes pour la production agricole. Ainsi, la République du Bénin est subdivisée en huit zones agro-écologiques en fonction de l’importance de la production agricole dans chaque zone. La majorité de ces communes produisent une spéculation abondante qui attire les oiseaux. En conséquence, les agriculteurs ont développé plusieurs méthodes pour effaroucher les oiseaux déprédateurs. La figure 1 montre la position géographique des communes échantillonnées pour cette étude.

Collecte et analyse des données

Les données ont été collectées dans sept communes dontchacune représente une zone agro-écologique. Il s’agit de Agbangnizoun, Bantè, Boukoumbé, Gogounou, Lokossa, Malanville, Zogbodomey. Dans chacune des communes cibles, de grandes zones agricoles ont été identifiées. Ensuite, des portions représentatives de ces zones ont été délimitées de façons stratifiées. Ainsi, les différentes formes d’agro-écosystèmes ont été prises en compte dans les mesures de délimitation afin de pouvoir inventorier toutes les méthodes d’effarouchement utilisées d’un type d’agro-écosystème à un autre (Mais, Riz et soja). Ces spéculations ont été choisies compte tenu de leur représentativité et leur disponibilité dans les communes ciblées car toutes les zones agro-écologiques en produisent et de façon abondante avec à la clé l’usage de méthodes d’effarouchement pour réduire l’impact de la visite des oiseaux sur leur production. Pour mesure de vérification et de confirmation, les unités d’observations sont présentées aux agriculteurs. Auprès de ces agriculteurs, des données ont été collectées dans les communes citées. Les ménages ont été sélectionnés de manière aléatoire. Un total de 714 agriculteurs a été interrogé dans les localités des communes cibles (Tableau 1).

L’application KoBoCollect et la plateforme koboToolbox (www.kobotoolbox.org) ont été utilisés comme des instruments de collecte de données (Nampa et al, 2020). En effet, l’application KoBoCollect et la plateforme koboToolbox permettent d’insérer le questionnaire sous forme de formulaires qui peut être remplis rapidement dans un smartphone ou une tablette. Chronologiquement, il se fait en quelques étapes à savoir: l’élaboration du questionnaire de recherche sous forme numérique, son insertion sur le serveur KoBoToolbox, le déploiement du formulaires/questionnaires et son téléchargement à partir du smartphone sur kobocollect. Les données collectées grâce à des agents enquêteurs d’appui disposant d’un smartphone sur lequel figure l’application Kobocollect.

Inventaire des méthodes d’effarouchement

La méthode utilisée est une combinaison d’inventaire par ligne ou parfois de point d’observation fixe pour dénombrer les méthodes de lutte rencontrées ou observées sur les sites d’étude. Ceci en raison des types d’agro-écosystèmes et l’applicabilité sur le terrain de l’un des techniques d’inventaire choisi. Le principe consiste à parcourir une ligne L minutieusement choisie, en scrutant de part et d’autre de l’axe pour détecter d’éventuels méthodes d’effarouchements installées (Niandou et al, 2016) ou leurs traces. Pendant la prospection, des arrêts sont effectués chaque fois qu’il le fallait pour les prises de vues et pour s’assurer des méthodes en place ou voir de plus près certaines méthode d’effarouchement qui ne sont pas forcément visible a des distance données. Les méthodes d’effarouchement dont les noms ne sont pas connus sont identifiées par la suite avec l’appui des agriculteurs grâce aux images prises sur le terrain. Le recensement est fait à tous les stades de production (Stade végétatifs). Tous les contacts auditifs (Pour certaines catégories de méthode d’effarouchement) ou visuels sont notés sans limitation de distance. Les points d’écoutes sont tous sur les transects installés. Au contact d’une méthode d’effarouchement, les notes sont prises dans une tablette à travers l’application KoboCollect et une photo est systématiquement prise.

Enquête auprès des agriculteurs

Dans le but d’avoir une catégorisation des différents espèces d’oiseaux selon leur mode d’action en milieu agricole, leur nom locaux et la description des méthodes d’effarouchement inventoriées, un complément d’information par enquête est réalisé. Ceci à travers l’administration d’un questionnaire à 714 agriculteurs par le biais de l’application «Kobocollect». Les données recueillies comprenaient les méthodes d’effarouchement utilisées, leur description et mode de fonctionnement puis leur relation avec les spéculations (Si une méthode est plus adaptée pour une spéculation donnée).

Analyse des données

Les données collectées ont été ensuite générée automatiquement par le biais de la plateforme kobotoolbox (www.kobotoolbox.org). C’est ce fichier en format XLS qui est utilisé pour les analyses. Dans le but de caractériser les techniques de contrôle de l’avifaune dans les champs, la valeur d’usage des techniques de lutte anti-aviaire a été déterminer grâce au package ethnobotayR. Quant à la valeur de la diversité des techniques, elle a été déterminé grâce au package vegan.

Par ailleurs, nous avons évalué l’effet du sexe et de l’ethnie sur la diversité des techniques de lutte anti-aviaire à travers une régression de la distribution de la famille poisson. Cette régression est réalisée grâce au package MASS du logiciel R 4.0.1. Le choix des variables du modèle a été effectué par une analyse du tableau des déviances par la fonction Anova.

Résultats

Catégorisation des oiseaux selon les enquêtés

Les communautés enquêtées ont un point de vue très large des oiseaux qui visitent le milieu agricole. A chaque espèce, une appréciation selon leurs observations. Ainsi, la figure 2 met en exergue une série de catégorisation des oiseaux qui visitent le milieu agricole selon les enquêtés. Sept catégories d’oiseaux sont répertoriées. Dans cette logique, on retrouve les oiseaux déprédateurs des champs avec une proportion de 83,3% contre 0,14% pour les oiseaux visiteurs et importants. Ceci pourrait être dû à la disponibilité des ressources qui attireraient plus de déprédateurs à tous les stades végétatifs.

Les techniques de contrôle des oiseaux déprédateurs des cultures

Au total, seize techniques de contrôle des oiseaux champêtres sont utilisées par les producteurs dans les agroécosystèmes des zones prospectées. La figure 3 présente les différentes techniques de protection des cultures recensées dans les agro-écosystèmes et leur proportion d’usage. La majorité des enquêtés pratique la surveillance (42,2%) quelques soit le type de culture considérée. Ceci s’explique par le fait que la surveillance est l’une des techniques qui pourrait prendre en compte les différentes actions d’effarouchement possible (Élimination, dissuasion) par rapport aux autres techniques. De plus, la présence humaine limite les mouvements des espèces dans les agro-écosystèmes car les espèces se sentent menacées. Cette technique est suivie de l’épouvantail et de l’avicide. Les autres techniques sont moins pratiquées (hameçon, sachet, piège…) avec des taux d’usage allant de 0,14% à 0,70% car nécessitant plus d’énergie et comportent des risques même pour le propriétaire du champ (Exemple: Piège, avicide…).

Au-delà des combinaisons qu’indique la figure 3, d’autres types de combinaison sont pratiquées par les agriculteurs pour une meilleure réussite de leur campagne agricole. Selon les enquêtés, il arrive que les agriculteurs utilisent les pièges mécaniques, les sons de cloche, les fils de cassette, les filets et les avicides. D’autre part, les agriculteurs utilisent le mélange des résidus de pile ronde et les tritures de feuilles de neem (Azadirachta indica) pour effaroucher et/ou pour éloigner les déprédateurs des cultures. L’ensemble de ces techniques permettent de parler de méthodes de lutte anti-aviaire.

Caractérisation des techniques de contrôle de l’avifaune des champs

L’ensemble des techniques répertoriées constituent les formes de lutte utilisées couramment par les populations pour faire face aux pertes dues aux oiseaux. Il existe une multitude de technique utilisées qui ont été réparties en quatre catégories à savoir: les répulsifs visuels (épouvantail, la patrouille, …), les répulsifs auditifs (les sons de cloche, les armes à feu, les cris, …), les répulsifs d’exclusion (constitué de répulsifs mécaniques et chimiques) et les répulsifs traditionnels. Au-delà de ces quatre catégories, les agriculteurs travaillent a combiner plusieurs de ces répulsifs à la recherche d’efficacité.

Les répulsifs visuels sont largement répandus et très pratiqués dans la zone d’étude avec un pourcentage de pratiquant de 29,2 % à Agbangnizoun, 29,0 à Bantè, 17,4 % à Boukoumbé, 24,0 % à Gogounou, 18,0 % à Lokossa, 19,0 % Malanville et 26,7% à Zogbodomey (Tableau 2). Ces répulsifs visuels sont pour la plupart inoffensifs pour la faune aviaire. Il s’agit entre autres des épouvantails fabriqués traditionnellement avec des vêtements usés accrochés partout dans les champs permettent de dissuader les oiseaux. Ils sont souvent installés au moment des semis et y restent jusqu’à la récolte s’ils ne sont pas emportés par les intempéries.

Les répulsifs auditifs sont constitués essentiellement des armes à feu de fabrication artisanale avec des poudres à effets acoustiques lointains. Ils permettent non seulement d’effaroucher les oiseaux mais parfois de les éliminer. Les sons de cloche composés d’un complexe de bouteille et de fer ou de feuillets de tôle suspendu qui résonnent au gré du vent sont classés dans la même catégorie. C’est une technique qui est pratiquée à hauteur de 21,8% à Agbangnizoun, 13,0% à Bantè, 12,6% à Boukoumbé, 19,0 % à Gogounou, 12,2 % à Lokossa, 24,0 % Malanville et 23,0% à Zogbodomey. On retrouve également dans cette catégorie, les bande de cassette qui résonnent au gré du vent et très réfléchissants à la lumière du soleil, ce qui effraie les oiseaux sans les éliminer.

Les répulsifs d’exclusions sont ceux utilisés à des fin d’élimination. Ils sont sous plusieurs formes (Mécanique ou chimique). Les répulsifs d’exclusion chimiques sont parfois mélangés aux semences pour être efficaces. On retrouve dans cette catégorie les herbicides, les avicides et les produits toxiques nuisibles aux déprédateurs ou à tout être vivant susceptible de le consommer. De plus, la patrouille humaine encore appelé surveillance qui consiste à surveiller les cultures du réveil tôt le matin avec une arme blanche comme une lance pierre ou des cailloux est un type de répulsif mécanique très utilisés sur toutes l’étendue du territoire. Les techniques d’exclusion se pratiquent le plus souvent au semis et au début de la maturation. Pour être efficace, la patrouille se déroule en deux étapes à savoir très tôt le matin (moment d’intense activité des oiseaux) jusqu’à l’apparition du soleil et l’après-midi correspondant à la deuxième période d’activité intense des oiseaux avant la tombée de la nuit. Elle est pratiquée dans toutes les communes.

Il existe d’autres de techniques pratiquées par une minorité et non connue de la majorité. Il s’agit de l’usage des composés inoffensifs constitués des extraits des plantes et des déchets obtenus des piles ou de la cendre. Ainsi, le liquide extrait des feuilles de nem par macération aqueuse est généralement mélangé avec les grains de maïs ou de haricot ou d’arachide ce qui lui confère une coloration jaune très répugnante que la majorité des déprédateurs, surtout le francolin à double éperon et la poulette des rochers ne supporte pas. Nous l’avons positionnés dans la catégorie chimique des répulsifs d’exclusion à cause de ses effets. 8 % des agriculteurs de Malanville la pratique, les agriculteurs d’Agbangnizoun s’y intéresse à hauteur de 9,8 %, Bantè 11,0 %, Boukoumbé 19,0 %, Gogounou, 9,5 %, Lokossa 13 % puis Zogbodomey 11,0 %. Selon quelques enquêtés, la couleur jaune serait l’ennemis des oiseaux en milieu Kotafon et N’tcha et le goût amer ne donne pas l’appétit aux oiseaux. Par ailleurs, certains enquêtés utilisent la cendre qu’ils mélangent aux semences pour leur changer de couleur afin d’amener les oiseaux à ne pas reconnaître facilement les semences mises en terre. Enfin, dans la commune de Malanville, quelques agriculteurs utilisent le miellat (produit collant extrait des plantes), qu’ils étalent sur des branches qui servent de perchoirs aux oiseaux. Ce dispositif leur permet de réduire l’effectif des oiseaux en s’approvisionnant en protéines animales. Il faut noter que tous les producteurs combinent les différentes techniques de contrôle de la faune ornithologique dans les agro-écosystèmes.

Pour une meilleure réussite de contrôle des ravageurs des cultures, les producteurs combinent plusieurs méthodes passant des acoustiques aux visuelles et même chimiques. Ainsi, pour éloigner les tisserins ravageurs des cultures de maïs da la région de Tiko, les populations agricoles utilisent des jets de pierre, des battements de mains, des tambours et des pesticides (Maurice et al., 2019).

Valeurs d’usage des méthodes de luttes

Le tableau 3 présente les valeurs d’usage des techniques de lutte anti-viaire en fonction des cultures. Il ressort de ce tableau que les techniques d’usages sont plus utilisées dans la combinaison de culture (VU= 254,3). Tandis que, dans les cultures de Riz et Maïs ayant la plus grande diversité en termes de technique à une faible valeur d’usage (VU=65,8).

Les valeurs de l’équitabilité de pielou permet de dire que les différentes techniques de luttes témoignent d’une certaines homogénéités dans les cultures utilisées (Tableau 3).

Effet des facteurs socio-démographique sur la diversité des techniques de lutte anti-aviaire

La diversité des techniques de luttes anti-aviaire est significativement influencée par le sexe et l’ethnie (Tableau 4). La diversité est significativement élevé chez producteur de sexe masculin (β=0,60±0,29; z=2,095; p=0,036). Aussi, cette diversité est significativement faible chez les ethnies Holi comparativement aux Bariba (β=-1,27±0,57; z= -2,23; p=0,026).

Discussion

L’étude explore les différentes méthodes de lutte anti-aviaires et l’effet des caractéristiques socio-démographique sur leur diversité. Elle a permis de révéler qu’une grande diversité de méthodes de luttes anti-aviaire est utilisée au Bénin sous plusieurs formes. Ainsi, plusieurs moyens contribuent à la protection des cultures parmi lesquels les lances pierres, les bandes des cassettes dont la vibration effarouche les oiseaux, les épouvantails comme en remplacement du producteur permettant aussi d’effaroucher les oiseaux. Ces techniques listées sont comparables à la liste des techniques publiées par Adékola et al., (2019).

Ces méthodes répertoriées ont été classées en quatre grandes catégories à savoir: les méthodes auditives, les méthodes visuelles, les méthodes d’exclusions et les méthodes mixtes. Ces différentes méthodes ont été classées en trois catégories par bien d’auteur comme Carrier (2002). Mais dans notre cas, la méthode mixte est la quatrième catégorie. Cette méthode est capable de prendre en compte les trois autres méthodes. Cela est due au fait que les populations ayant déjà essayé pendant longtemps les trois autre méthodes ont voulu innover ou sont à la recherche de méthode plus efficaces pour faire face aux oiseaux déprédateurs.

Dans l’ensemble, les interventions de l’homme dans ce processus de lutte anti-aviaire se résument en deux stratégies, la première consiste à la protection des sites avec des méthodes variées dont le but est d’éloigner les oiseaux (usage d’épouvantail, usage du bruit sous toutes ces formes, usage de répulsif chimique, usage du filet) et la deuxième consiste à l’élimination des oiseaux. Cette observation est conforme à celle de Clergeau (2000).

Contrairement à toutes ces méthodes utilisées dans certaines localités du Bénin, Mallamaire (2018) a identifié des techniques comme l’épouvantail éclairé par des lampes à pétrole, les détonateurs à carbure utilisés par les agriculteurs en Mauritanie, au Sénégal et au Soudan, ce qui demande assez de moyen financier. Ces techniques sont adaptées aux milieux d’études qui sont à moitié désertiques où les oiseaux ne disposent pas assez de ressources alimentaires comme les fruits sauvages ou insectes et sont obligés de s’attaquer aux cultures. Au-delà de ces techniques Bernard TRECA (1985) a déterminé en Afrique de l’ouest d’autres méthodes comme les cadavres d’oiseaux disposés aux lieux stratégiques des parcelles, les oiseaux de proie comme les rapaces, la cendre rependue au sol, des gri-gris pour éloigner les déprédateurs et aussi la méthode de girophares. Cela dépend des moyens financiers et de la main d’œuvre dont dispose l’agriculteur car il n’est pas facile d’adopter par exemple les rapaces. Les travaux de Bishop et al., (2003) ont permis de déterminer des techniques complémentaires aux techniques répertoriées au Bénin dont les canons à gaz, les chiens dressés, les miroirs et réflecteurs, les fils électriques aériens excluant les oiseaux des parcelles. Après évaluation de ces techniques de dissuadassions, on remarque qu’elles sont très coûteuses et seuls les agriculteurs nanties ayant les moyens nécessaires peuvent les adopter. Au Bénin par contre, les techniques utilisées sont plus ou moins adaptées à l’écologie car les oiseaux sont malgré tous des espèces à conserver.

La diversité des techniques de luttes anti-aviaire est significativement influencée par le sexe (p=0,036) et l’ethnie (p=0,026). Ces résultats diffèrent de ceux trouvés par Bouet et al. (2017) où l’effet des répulsifs anti-aviaire est significativement lié aux taux de levé de la plante et au rendement en paddy. De même, une différence des résultats est observé chez Luzia (1983) qui souligne une haute significativité entre les dommages créés par les corbeaux et la date de germination (r = 0,99 ; P = 0,001).

Conclusion

Cette étude a permis de révéler l’existence de plusieurs techniques de contrôle des oiseaux des champs utilisés par les agriculteurs qui demeurent encore partiellement archaïques. De plus, il est donc évident de souligner que la diversité observé dépend des variables socio-démographiques comme l’ethnie et le sexe. Quant à l’efficacité, elle représente la préoccupation quotidienne des agriculteurs, ce qui les amène à opérer de multiples combinaisons dans l’unique but de réduire les actions des oiseaux déprédateurs. Par ailleurs, l’efficacité des méthodes de contrôle des oiseaux déprédateurs dépend largement de l’effort ou de la persistance du paysan.

Les moyens modernes de contrôle des déprédateurs et la législation sur la protection de la faune sont méconnus des producteurs dans les différentes zone agro-écologiques du Bénin. L’utilisation des méthodes létales telles que les produits chimiques (avicide) et les fusils de chasse ne renvoient pas totalement les oiseaux tant que les cultures restent dans les champs. Vu les pertes énormes enregistrées malgré l’application des techniques de contrôle, un vaste programme d’effarouchement des oiseaux est souhaitable avec des restrictions qui témoignent du respect des textes en vigueur dans le processus. L’efficacité d’une telle mesure pourrait faciliter la lutte contre les oiseaux champêtres afin de contribuer à une autosuffisance alimentaire pour la population productrice.

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Publié-e

15-03-2023

Numéro

Rubrique

Production Végétale et Environnement