Evaluation de performances agronomiques de nouvelles variétés de cotonnier (Gossypium hirsutum L.) introduites dans le bassin cotonnier du Sénégal
Mots-clés :
Production, Variété, Rendement, Coton graine, Zone cotonnière, SénégalRésumé
Face à la variabilité inter et intra-annuelle de la pluviométrie en zone cotonnière sénégalaise, l’amélioration de la productivité repose en grande partie sur la stratégie de choix et de diffusion de matériel végétal performant et adapté à la zone. Ainsi, une étude comparative des performances agronomiques de quatre nouvelles variétés de cotonnier en fonction des différentes zones agro- climatiques du bassin cotonnier du Sénégal a été initié. L’expérimentation a été réalisée entre 2015 et 2016 dans trois Antennes Multilocales d’Expérimentation (AMEX). Un dispositif en blocs aléatoires complets avec quatre répétitions a été utilisé. Les observations ont porté sur la précocité à la floraison, la précocité à la maturité des capsules et le rendement et ses composantes. Les résultats ont montré que les variétés FK 37 et FK 64 sont au même niveau de précocité que le témoin vulgarisé (Stam 129) et enregistrent de bons niveaux de production (coton graine et fibres). La variété IRMA-L484 s’est caractérisée par une maturité tardive et une faible production en fibre. IRMA-L457 a une capacité productive en coton graine et en fibre, mais elle présente une maturité tardive. En plus des performances agronomiques, l’études des caractéristiques technologiques de la fibre pourrait renforcer le critère de choix des variétés en substitut de celle vulgarisée en zone cotonnière.
Mots clés: Production, Variété, Rendement, Coton graine, Zone cotonnière, Sénégal
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INTRODUCTION
Au Sénégal, le coton sert de moteur de développement dans les zones d’implantations et fournit d’importantes ressources financières à la population rurale et urbaine. Il fait partir des dix premiers produits d’exportation du pays et contribue à 1,4% du PIB national (Fall, 2013). La culture du coton constitue en effet le principal moyen d’accès aux ressources de production (engrais, les pesticides et matériels agricoles) et un moyen de revenue d’une large frange de la population.
Toutefois, depuis 2007, la filière cotonnière fait face à de nombreuses contraintes qui affectent la production, et amoindri le revenu des producteurs (Sarr et al., 2021). Les contraintes liées à la production de coton sont nombreuses et varient d’une zone de production à une autre (Traoré et al., 2021). Il s’agit principalement de l’inadaptation des variétés actuellement cultivées qui sont vulnérables aux conditions agro-écologiques et parasitaires du bassin cotonnier sénégalais. Par conséquent, la base de la production cotonnière est la lutte contre les ravageurs (Badiane et al., 2015) et l’amélioration variétale pour de meilleurs rendements, indispensables pour la rentabilité du secteur. La production en coton-graine à l’hectare en Afrique est parmi les plus faibles au monde et ne dépasse souvent pas une tonne (UEMOA 2010). Il s’y ajoute que les pays africains payent fort les exigences du marché internationale (Bourgou et al., 2013) et particulièrement au Sénégal, les rendements se situent à des niveaux peu compatibles avec le coût élevé du paquet technique préconisé.
Pour faire face à cette situation, les sélectionneurs font appel à de nouvelles variétés ayant de hauts potentiels de rendements (Ndoye et al., 2011 et Bourgou et al., 2013). Les sociétés cotonnières sont donc amenées à adapter leur mode de production et en particulier leur stratégie de choix des variétés à diffuser et de leur aire de culture dans les zones de production (Ndour et al., 2017).
C’est dans ce cadre que s’inscrit la présente étude dont l’objectif est de comparer les performances agronomiques de quatre nouvelles variétés de coton en fonction des conditions agro-climatiques du Sénégal. Il s’agit spécifiquement de trouver un matériel végétal alternatif à la variété actuellement vulgarisée (Stam 129 A).
MATÉRIEL ET MÉTHODES
Sites d’étude
L’étude a été menée durant l’hivernage 2015 et 2016 dans trois Antennes Multilocales d’Expérimentation (AMEX) de la zone cotonnière (Figure 1). Il s’agit de:
• AMEX de Koussanar, dans la région de Tambacounda (13°52’ de latitude Nord et à 14°05’ de longitude Ouest). Cette AMEX se situe en zone sèche du bassin cotonnier. Le climat est de type soudano sahélien et la pluviométrie annuelle qui varie entre 600 et 700 mm.
• AMEX de Vélingara (région de Kolda), qui s’étend entre 13° 09′ de latitude Nord, 14° 07′ de longitude Ouest. Vélingara se trouve sur la zone médiane du bassin cotonnier avec un climat soudanien et une pluviométrie annuelle entre 700 et 800 mm.
• AMEX de Syllacounda, dans la région de Kédougou (12° 33’ Nord, 12° 11’ Ouest). Ce site se trouve dans la zone humide du bassin cotonnier, avec un climat soudano guinéen recevant entre 800 et 1200 mm de pluie par an.
Globalement, les pluies de l’hivernage 2015 et 2016 sont enregistrées en fin mai début juin (Tableau 1). Les cumuls des quantités d’eau relevées tournent en moyenne autour 600 mm à Koussanar, 800 mm à Vélingara et 1000 mm à Syllacounda.
Matériel végétal
Le matériel végétal est constitué de quatre variétés introduites (FK 37, FK 64, IRMA-L457 et IRMA-L484) et d’un témoin vulgarisé, Stam 129A (Tableau 2).
Dispositif expérimental
Un dispositif en blocs aléatoires complets avec quatre répétitions a été installé. Chaque parcelle élémentaire comporte six (6) lignes de cotonniers de quinze mètres. Les écartements de semis sont de 80 cm entre les lignes et 15 cm entre les poquets sur la ligne. Les blocs sont séparés par une allée large de deux (2) mètres. La parcelle utile est représentée par les quatre (4) lignes centrales.
Conditions de culture
L’essais a été conduit conformément à l’itinéraire technique vulgarisé en zone cotonnière. Toutes les opérations culturales, en dehors des modalités testées (variétés) ont été réalisées de manière uniforme sur tous les objets. Les dates de semis, de levée et les doses de fertilisation sont consignées dans le tableau 3.
Observation et mesures
• La précocité de floraison (en jours après la levée) est la date à laquelle le cumul du nombre de fleurs est égal à la moitié du nombre de plants sur la ligne (Date de 50% de floraison). Le nombre de plants portant une fleur du jour est compté séparément dans chaque ligne.
• La précocité d’éclatement de capsules (en jours après la levée) correspond à la date pour laquelle le nombre de capsules ouvertes est égal à la moitié du nombre de plants sur la ligne (Date de 50% de d’éclatement).
• Le rendement coton graine est le rapport du poids coton graine récolté sur la surface des quatre (4) lignes centrales.
• Le rendement fibre et le poids des cents (100) graines (Seed index) sont déterminés au niveau de l’usine d’égrenage. Ceux-ci sont obtenus à partir de cinq (5) plants, pris au hasard au niveau de la parcelle utile de chaque répétition.
Traitement et analyse des données
Les analyses statistiques sont faites avec le logiciel GenStat Discovery 10.3.0.0 (Payne et al.,2007). Des analyses de la variance sont effectuées et les moyennes par variété sont comparées à l’aide du test de Newman Keuls. Les graphes sont obtenus avec le logiciel R (R i386 3.2.1) (Cornillon et al., 2010).
RÉSULTATS
Précocité de floraison et de maturité
La floraison est asymétrique et significativement (P<0,05) différentes entre les variétés testées (Figure 2). Quel que soit le site et l’année, les variétés FK 37 et FK 64 sont plus précoce que le témoin vulgarisé (Stam 129 A). La variété FK 64 est très homogène dans sa floraison comparée aux variété IRMA-L457 et IRMA-L484.
La durée entre la levée de cotonniers et l’ouverture des capsules (Figure 3) est significativement différente entre les variétés (zone médiane et humide P <0,001, zone sèche P<0,05) quel que soit le site et l’année. Les variétés FK 37 et FK 64 sont statistiquement plus précoces et sont au même titre que le témoin vulgarisée (Stam 129 A). Toutefois, la variété Stam 129 A semble être beaucoup moins homogène dans sa maturité.
Rendement coton graine, pourcentage fibre et Seed Index (SI)
L’analyse de la variance réalisée sur le rendement en coton graine montre que ce paramètre distingue moins les variétés (Tableau 4). Toutefois, en zone sèche, la variété IRMA-L484 s’est montrée significativement plus importante en première année de test (2015) avec un rendement moyen de 769 ± 82 kg. ha-1 contre 639 ± 42 kg.ha-1 pour le témoin (Stam 129A). En zone humide et intermédiaire, aucune différence significative n’a été observé entre les variétés testées pour le rendement en coton graine. Cependant, la variétés FK 64 est arithmétiquement supérieur aux autres variétés pour le rendement en coton graine.
Le rendement fibre et le poids des cent graines sont respectivement présenté dans les tableaux 5 et 6. En zone sèche et humide, les meilleurs taux de fibres sont significativement obtenus avec les génotypes FK 37, FK64 et IRMA-L457 (Tableau 5). Par contre, l’analyse de la variance du poids des cents graines montre des différences significatives (P< 0,05) en faveur de la variété IRMA-L484, quel que soit la zone (Tableau 6).
DISCUSSION
Les variétés FK 37 et FK 64 ont le même cycle de floraison que la variété témoin (Stam 129 A) en zone sèche, médiane et humide et sont plus précoces que les variétés IRMA-L457 et IRMA-L484. Selon le site et la date de semis, la durée entre la levée des cotonniers et la floraison varie généralement entre 50 à un peu plus de 60 jours dans le bassin cotonnier du Sénégal (Ndour et al., 2007). Les variétés testées sont dans cette gamme de cycle. Toutefois, IRMA-L457 et IRMA-L484 fleurissent et entrent en maturité tardivement par rapport aux variétés FK 37, FK 64 et au témoin vulgarisé (Stam 129 A). La précocité des variétés FK 64 et FK 37 pourrait donc être un atout face aux déficits hydriques souvent enregistrés en campagne (Traoré et al., 2021). En effet, en conditions aléatoires (durée du jour et température très variables au cours des saisons), des variétés à maturité groupée et dans certains cas, à cycle très court sont demandées (Sement, 1986). La FK 64 semble donc être la variété qui répond à ces caractéristiques dans toutes les zones de test.
Le rendement en coton graine contraste moins les variétés alors que le rendement fibre et le poids des cents graines ont permis de les distinguer. Ces résultats ont été aussi obtenus par Clouvel et al., (2007), qui soulignent une faible amélioration du rendement en coton graine de variétés testées alors qu’un effet marqué a été observé sur leurs rendements égrenage et leurs caractéristiques commerciales.
Par ailleurs, selon Munk et Kurby (1993) et Xiang et al., (1994), la distinction des variétés pour la production de fibre, est de nature génétique; ceci expliquerait, les différences de rendements fibres observées, en faveurs des variétés, FK 64, FK 37 et IRMA-L457, qui pourrait signifier que celles-ci s’adaptent le mieux dans la zone cotonnière pour l’industrie textile. Ces résultats sont en harmonies avec ceux obtenus avec Bourgou et al., (2020), identifiant la variété FK 64 comme une variété répondante aux attentes du marché international de la fibre au Burkina Faso. Le pourcentage fibre et le poids des 100 graines (SI) sont faiblement liés et évoluent en sens inverse (Hougni et al., 2016), ce qui expliquerait la supériorité de la variété IRMA-L484 pour le poids des 100 graines, qui était en retard dans la production de fibre.
CONCLUSION
L’objectif de notre étude est d’évaluer les performances agronomiques de nouvelles variétés de cotonnier en provenance des systèmes nationaux de recherches agricoles (SNRA), particulièrement du Burkina Faso et du Cameroun, dans les conditions agro-écologiques du Sénégal. Pour ce faire, des essais ont été menés en zone sèche, médiane et humide du bassin cotonnier sénégalais.
Il ressort des comparaisons effectuées que la variété FK 37 est une variété précoce et a un potentiel de production en coton graine et fibre, mais ses périodes de floraison et de maturation ne sont pas homogènes d’une zone à une autre. La variété IRMA-L484 est très tardive dans sa maturité et moins régulière que les autres variétés en termes de précocité. Elle est aussi en retard pour la production en fibre. Il serait donc important de suivre davantage ces deux variétés dans les campagnes à venir. La capacité productive en coton graine et en fibre de IRMA-L457 est importante, mais elle se caractérise par une maturité tardive. La variété FK 64 de par sa précocité et son bon niveau de production a donné les meilleurs résultats et semble être plus une alternative au témoin vulgarisée (Stam 129 A).
Les résultats obtenus sont certes encourageants et porteurs d’espoir pour l’amélioration de la production dans la zone cotonnière sénégalaise mais le travail doit être poursuivi sur la technologie de la fibre.
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