Politiques de prophylaxie, d’épidémio-surveillance, de traitement des maladies bovines et des zoonoses en RD Congo de 1960 à 2023

Auteurs-es

  • Bruno MITEYO Faculté de Médecine Vétérinaire, Université Pédagogique Nationale, Kinshasa, RDC
  • Matthieu Willy KABAMBA MWAMBA Faculté de Médecine Vétérinaire, Université Pédagogique Nationale, Kinshasa, RDC
  • Didier TSHIKUNG Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Lubumbashi, Lubumbashi, RDC
  • Bernard LUTUTALA Faculté des Sciences Économiques, Université de Kinshasa, Kinshasa, RDC
  • Célestin PONGOMBO Faculté de Médecine Vétérinaire, Université de Lubumbashi, Lubumbashi, RDC

DOI :

https://doi.org/10.5281/zenodo.15018430

Mots-clés :

Politiques, prophylaxie, épidémio-surveillance, traitement et zoonose.

Résumé

L’Organisation Mondiale de la Santé Animale (OIE) et l’Organisation Mondiale pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO) estiment dans leurs différents rapports que la production et la santé animale ont un grand rôle à jouer sur la sécurité alimentaire, sur l’économie et sur la santé publique des nations, particulièrement des populations pauvres. Le rapport Veterinary Public Health and Food Safety (OIE, 2016) souligne l’importance de la santé publique vétérinaire dans la prévention des maladies zoonotiques et dans la sécurisation des produits d’origine animale, comme la viande. En outre, il met en évidence la nécessité de la collaboration internationale entre les gouvernements, les organisations sanitaires et les institutions scientifiques pour renforcer la capacité à répondre aux menaces émergentes et prévenir les crises sanitaires. Malgré ses attentes multiples et variées pour l’élevage, la République Démocratique du Congo ne dispose pas d’une politique globale, inclusive et cohérente, pour aborder toutes ces recommandations capitales de la FAO et de l’OIE. Les lois vétérinaires et de l’élevage datent de la période coloniale, d’avant 1960, et n’ont jamais été revisitées, contextualisées et adoptées formellement. En outre, la limitation quasi permanente des ressources financières octroyées, en dépit de la volonté politique et la faiblesse de la gouvernance du secteur d’élevage bovin sur la production bovine, la santé publique et les revenus des éleveurs avec comme conséquence d'énormes pertes. Le Programme d’Appui au Développement du Secteur Privé (PADSP) estime que le secteur de la production et de la santé bovine en République Démocratique du Congo (RDC) reste caractérisé par l’insuffisance d’informations fiables, le manque d’orientations stratégiques claires et d’instruments appropriés de développement du secteur et de gestion durable des ressources bovines.

Mots Clés: Politiques, prophylaxie, épidémio-surveillance, traitement et zoonose

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INTRODUCTION 

L’Organisation Mondiale pour l’Alimentation et l’Agriculture dans son rapport "Animal Health systems and Services", met l’accent sur le rôle des systèmes de santé animale dans le développement durable et la sécurité alimentaire mondiale. Ce rapport montre également l’importance des services de santé animale pour la prévention et le contrôle des maladies animales, en particulier les zoonoses, qui peuvent avoir des impacts graves sur la santé humaine, la sécurité alimentaire et les économies. En outre, il met en lumière les défis rencontrés pour établir des systèmes de santé efficaces et accessibles (FAO, 2017).

Un autre rapport de la FAO examine les cadres politiques nécessaires pour promouvoir un développement durable du secteur d’élevage. Il propose des lignes directrices pour les gouvernements afin de mettre en œuvre des politiques qui favorisent l’efficacité, la durabilité, et l’inclusivité dans le secteur d’élevage (FAO, 2022).

Selon la même source, en RDC, les politiques du gouvernement sur la production et la santé animales sont déficitaires, confuses et non contextualisées. De même, la législation sur l’élevage et le secteur vétérinaire est obsolète, datant de la période coloniale.

Les maladies émergentes et re-émergentes des bovins et les mouvements incontrôlés des bétails constituent un champ favorable de contamination et de propagation des maladies. La prévention des maladies par mesures d’hygiène générale et par vaccination rencontre des difficultés de mise en œuvre (Kiatoko, 2004).

Le Réseau National d’Epidémio-surveillance (RENES) installé en RDC par le Programme «Pan Africain de Contrôle des Epizooties» (PACE) ne fonctionne plus correctement à cause de la limitation des ressources financières (Anonyme, 2017a).

L’OIE plaide pour des investissements dans les systèmes de santé animale pour garantir une meilleure gestion des risques sanitaires et soutenir efficacement le traitement des maladies animales pour une bonne croissance économique (OIE, 2016).

Les médicaments utilisés pour le traitement des maladies bovines deviennent rares en RDC car importés et davantage coûteux. Les éleveurs recourent de plus en plus aux plantes médicinales (Kambale, 2018).

Les épizooties bovines, en effet, provoquent souvent la baisse des productions avec les coûts élevés des opérations de prophylaxie, d’épidémio-surveillance, de traitement ainsi que la baisse de commercialisation et des pertes par suite de la mortalité des bovins.

La santé bovine est un pilier essentiel pour la production animale et la sécurité alimentaire en République Démocratique du Congo, souligne un rapport de l’OMS. Ce rapport de l’OMS sur la RDC explore les répercussions de la santé animale sur la santé publique, en mettant particulièrement l’accent sur les zoonoses. Le document souligne aussi l’importance de la prévention et du contrôle des zoonoses comme la grippe aviaire, le virus Ebola ou la tuberculose (WHO, 2015).

C’est notamment la raison de la mise en œuvre de la Stratégie Nationale Multisectorielle de Communication des Risques liées aux six groupes de zoonoses prioritaires en RDC pour la période allant de 2020 à 2024 en vue de combattre les zoonoses dont la lutte est estimée insuffisante en RDC (Anonyme, 2019).

Cette mise au point permettra de connaître l’état des lieux des connaissances sur les politiques gouvernementales et les défis de mise en œuvre de prophylaxie, d’épidémio-surveillance et de traitement des zoonoses en RDC durant la période allant 1960 à 2023. Ceci permettra, après confrontation des résultats des enquêtes de terrain, de proposer au gouvernement et aux acteurs institutionnels et privés des perspectives améliorantes.

GÉNÉRALITÉS DU CADRE SANITAIRE D’ÉLEVAGE DES BOVINS EN RDC

Au cours des années 1940 à 1960, durant la période coloniale, le secteur élevage et santé bovines a bénéficié des structurations et des traitements différents, tenant compte des orientations coloniales qui distinguaient les élevages des Européens de ceux des Indigènes (Anonyme, 1949).

A partir des années 1960, après l’indépendance de la RDC, les secteurs d’élevage et de santé animales était une direction du Ministère de l’Agriculture, des fois en combinaison fonctionnelle avec la direction qui traitait du développement rural.

Schultz (1964), souligne le rôle des politiques publiques pour favoriser la transformation agro-pastorale. Il plaide pour des réformes agraires et des subventions à accorder au secteur.

La FAO (2013) met en évidence les effets des maladies animales sur les économies en explorant notamment comment les épidémies de maladies animales peuvent avoir des répercussions économiques profondes, provoquant des pertes massives de bétails, entraînant des fluctuations des prix des produits animaux, affectant les moyens de substance des éleveurs et perturbant les marchés locaux et internationaux. En outre, ces maladies peuvent entraîner des pertes de revenus importantes et réduire la capacité des populations d’accéder à des aliments nutritifs, aggravant ainsi les problèmes de pauvreté et de malnutrition. Elle plaide pour l’adoption des politiques efficaces qui intègrent la santé animale dans les stratégies de sécurité alimentaire. Les gouvernements doivent mettre en place des systèmes de surveillance sanitaire robustes, des programmes de vaccination et des stratégies de prévention des maladies.

En 1998, la RDC a présenté un cadre de réformes économiques et de privatisation dans un contexte de crise économique et de gouvernance défaillante.

L’OIE (2016) traite de l’importance de la santé publique vétérinaire dans la prévention des maladies zoonotiques et dans la sécurisation des produits d’origine animale comme la viande. L’OIE met en avant l’importance de la collaboration internationale entre les gouvernements, les organisations sanitaires et les institutions scientifiques pour renforcer la capacité à répondre aux menaces émergentes et de prévenir les crises sanitaires. En outre, il insiste sur l’importance des stratégies de surveillance, de contrôle, et de réductions des risques de transmission des maladies, notamment par la vaccination, la détection précoce et la gestion des risques dans le secteur.

Le Réseau National d’Epidémio-surveillance (RENES) installé en RDC aux années 2000 par la Coordination Nationale du Programme Pan Africain de Contrôle des Epizooties (PACE) est en charge de la lutte contre les principales maladies. Il n’est pas fonctionnel.

La création du Ministère de Pêche et Élevage, en octobre 2016, a renforcé et élargi les attributions de la Direction de Production et de Santé Animale (DPSA) selon le Cadre et Structures organiques du Secrétariat Général de Pêche et Élevage de 2023, publié en février 2024.

PROPHYLAXIE DES MALADIES BOVINES 

La prophylaxie ou la prévention des maladies est d’une importance capitale dans les pays ayant des potentialités bovines avérées, comme la RDC (FAO, 2011).

Dans le cadre de la prophylaxie, la lutte contre les maladies se fait par la prophylaxie médicale ou vaccination et la prophylaxie zoosanitaire comprenant les mesures de sensibilisation, d’hygiène générale et de quarantaine (Smith, 2014).

En RDC, le programme de prophylaxie existe, mais ne trouve pas d’application pour raison de limitation des ressources.

Importance de la prophylaxie

La FAO (2011), estime que l’importance de la prophylaxie contre les maladies bovines se résume en:

• L’amélioration de la santé et du bien-être animal: réduction de la morbidité et de mortalité; amélioration du bien-être animal;

• L’augmentation de la productivité: production notamment et efficacité reproductive;

• La réduction des coûts de santé animale: diminution des dépenses médicales, économie de temps et de ressources;

• La sécurité sanitaire et alimentaire: qualité des produits, confiance des consommateurs;

• La prévention des épidémies et des zoonoses: contrôle des maladies transmissibles et protection de la santé publique.

Inexistence de la prophylaxie

L’inexistence d’un programme efficace et mis en œuvre de la prophylaxie contre les maladies bovines dans un pays à potentialités bovines peut entraîner des conséquences graves et variées, dont notamment:

• Les conséquences sur la santé animale: propagation des maladies, réduction de la productivité, bien-être animal mal compris;

• Les conséquences économiques: pertes financières pour les éleveurs, diminution des revenus nationaux, réduction de la compétitivité;

• Les conséquences sur la santé publique: augmentation des zoonoses, sécurité alimentaire compromise;

• Les conséquences sociales: pauvreté rurale aggravée, migration rurale-urbaine;

• Les conséquences environnementales: dégradation des terres, impact sur les écosystèmes.

Prophylaxie médicale

La vaccination des bovins, appelée prophylaxie médicale, contre des épizooties est un élément clé de la prophylaxie.

Prophylaxie zoosanitaire

Cette prophylaxie consiste à adopter et à respecter les mesures d’hygiène, d’alimentation et de nutrition, de quarantaine et de sensibilisation générale.

Biosécurité

Une bonne biosécurité est essentielle pour éloigner les maladies des animaux. Cela protégera également la santé des travailleurs et de tous les membres du public qui pourraient visiter la ferme.

Les mesures générales de biosécurité doivent permettre de:

• Restreindre et contrôler les mouvements de personnes, de véhicules et d’équipements dans les zones de bétails;

• Nettoyer et désinfecter les matériels, les véhicules, les vêtements et les chaussures de protection avant et après contact avec les animaux de la ferme.

La présence d’une maladie peut ne pas toujours être apparente, en particulier dans les premiers stades, les mesures ci-dessus doivent donc faire partie de la routine.

En RDC, la majorité des éleveurs traditionnels et de Petites et Moyennes Entreprises (PME) ne connaissent pas les règles élémentaires de la biosécurité. D’une manière générale, le niveau de biosécurité est très faible voire inexistant dans les petits élevages et les élevages traditionnels (Anonyme, 2012).

Nutrition

Une bonne nutrition des troupeaux peut renforcer le système immunitaire des animaux, réduisant ainsi leur susceptibilité aux maladies.

La RDC dispose d'usines d’aliments pour bétails installées dans les grands centres, comme Lubumbashi et Kinshasa. Actuellement, certaines de ces usines ont fermé ou tournent au point mort. Elles affrontent les problèmes de la fiscalité et le coût d’acquisition de la matière première.

En RDC, l’utilisation des fourrages pour les mauvaises saisons n’est pas d’usage. C’est la transhumance qui est la solution palliative avec toutes ses conséquences auquelles les éleveurs et leurs cheptels sont exposés.

Enfouissement de cadavres

La plupart des nations ont émis des directives sur l’enfouissement des cadavres provenant des animaux d’élevage ou de la faune sauvage.

En effet, pour des raisons de maladies contagieuses ou non, zoonoses ou pas, inondations ou canicules, accidents de tout genre ou toute suspicion de cause infectieuse écartée, les animaux peuvent mourir et les cadavres doivent être détruits ou enfouis (Anses, 2022).

La décomposition des cadavres stockés et/ou abandonnés peut engendrer la pullulation, puis la contamination par des germes infectieux.

En RDC, malgré la sensibilisation des éleveurs quant aux multiples risques de manipulation des cadavres, les populations s’organisent pour déterrer les cadavres avec la chaux vive. Des cas de consommation des bovins atteints de charbon ont été signalés (Kabamba, 2024).

Défis de prophylaxie bovine en RDC

• L’insuffisance de moyens financiers pour réaliser les campagnes de vaccination et la dépendance quasi permanente des organismes comme la FAO, le PNUD;

• Les campagnes de vaccination ne sont pas systématiques pour les maladies obligatoires;

• Le recours aux pratiques traditionnelles infructueuses de prévention des maladies n’est pas rassurant (Kambale, 2002).

EPIDÉMIO-SURVEILLANCE EN SANTÉ BOVINE EN RDC

La mise en place des systèmes de surveillance pour détecter et signaler des foyers de maladies bovines et la création des bases de données centralisées pour suivre l’évolution des maladies et l’efficacité des interventions sont recommandées par l’OIE (2013).

Importance de la surveillance

• Réseau de surveillance pour la collecte des données sur la santé animale;

• Signalement et notification pour le signalement rapide et obligatoire des maladies, permettant une réponse rapide et efficace aux épidémies;

• Diagnostic précis et rapide en utilisant les laboratoires et les technologies de diagnostic;

• Base de données et gestion de l’information: plateformes informatiques pour la collecte, le stockage, l’analyse et la diffusion des données sur la santé animale et l’analyse des données pour leur interprétation;

• Capacité de réponses et de gestion des crises en développement des plans d’urgence et de formation continue des professionnels et des éleveurs pour qu’ils soient prêts à réagir efficacement en cas d’épidémie;

• Coopération et partenariats: collaboration interinstitutionnelle et partenariats Public-Privé;

• Prévention et contrôle: mise en place des programmes de vaccination régulière et des mesures de biodiversité par adoption de pratiques pouvant réduire le risque d’introduction et de propagation des maladies (Salman, 2003).

Bonne épidémio-surveillance

Une bonne épidémio-surveillance en santé animale repose sur plusieurs piliers fondamentaux. Ces éléments sont essentiels pour détecter, surveiller et contrôler les maladies animales de manière efficace. Les principaux composants sont ci-après libellés (FAO ,2011).

Insuffisance de surveillance

L’insuffisance de l’épidémio-surveillance en santé animale peut avoir de nombreuses conséquences négatives touchant la santé animale, la santé publique, l’économie et même les aspects sociaux et environnementaux (Thrusfield, 2018).

• Conséquences sur la santé animale telles que la propagation des maladies, la mortalité et la morbidité accrues, et la réduction de la productivité;

• Conséquences économiques: pertes financières pour les éleveurs, impact sur les exportations, coûts accrus pour les gouvernements;

• Conséquences sur la santé publique: augmentation des zoonoses et compromission de la sécurité alimentaire;

• Conséquences sociales: aggravation de la pauvreté rurale et migration rurale-urbaine;

• Conséquences environnementales: dégradation des terres, impact sur les écosystèmes locaux, affectant la biodiversité et les cycles écologiques.

Impact négatif de l’épidémio-surveillance

L’épidémio-surveillance en santé bovine est généralement perçue comme un outil essentiel pour prévenir et contrôler les maladies, mais elle peut aussi avoir certains impacts négatifs potentiels à savoir:

• Coûts élevés des investissements financiers et grande charge financière pour les éleveurs;

• Complexité logistique: lourdes bureaucraties et administration et infrastructures inadéquates;

• Risques de faux positifs et de faux négatifs: diagnostics erronés et stigmatisation des exploitations;

• Répercussions économiques: restrictions commerciales et abattage préventif entraînant des pertes économiques (Thrusfield, 2018).

Impacts psychologiques et sociaux

Les éleveurs peuvent avoir le stress et l’anxiété de suite de la pression continue de la surveillance et des conséquences potentielles de détection.

En outre, la confiance des éleveurs dans les systèmes de surveillance et les autorités sanitaires en cas des erreurs de diagnostic et des mesures prise peut s’ébranler (OIE, 2018).

Réseaux de communication

Il s’agit de créer des réseaux entre les éleveurs, les vétérinaires et les autorités sanitaires pour faciliter le partage d’informations sur la santé animale.

La Banque Mondiale souligne le rôle des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans le secteur agricole en particulier pour les petits producteurs (World Bank, 2010). En RDC, il existe un dysfonctionnement quasi-total de communication. Il n’existe pas de support technologique. Le rôle des relais communautaires est connu mais le réseau ne fonctionne pas de manière efficiente.

Défis de communication en RDC

• Accès limité aux informations, aux alertes pour signaler les foyers de maladies et coordonner les réponses ainsi que l’accès aux marchés et aux services financiers;

• Infrastructures limitées surtout en zones rurales où l’accès à l’internet ou aux services de téléphonie est restreint;

• Manque de compétences en numérique de petits éleveurs limite leur capacité à utiliser efficacement les TIC;

• Coût d’accès aux technologies est un obstacle majeur pour de nombreux petits éleveurs.

TRAITEMENT DES MALADIES BOVINES

La RDC a élaboré une mise en œuvre des politiques agricoles, mais souvent entravées par des ressources très limitées et une bureaucratie inefficace (Scoones et Wolmer, 2006). Le pays a mis en œuvre des politiques agricoles, mais ne dispose pas de politique de traitement des maladies animales pour prévenir et/ou résoudre les problèmes qui peuvent se poser et leurs conséquences sur la santé animale et la santé humaine. La loi sur l’élevage est inexistante.

Les médicaments sont utiles pour prévenir ou résoudre les maladies chez les bovins, mais ils ne sont pas utilisés en RDC de manière responsable suite à la mauvaise conservation, au non-respect de dosage, à l’administration non guidée par un diagnostic objectif, etc.

Les enquêtes et les rapports des services vétérinaires du pays montrent que plusieurs maladies d’allure enzootique, épizootique, ou panzootique, considérées par l’OIE comme prioritaires et sont également répertoriées en RDC.

La situation se présente comme suit pour les ruminants: Trypanosomiase, Theilériose, Charbon bactéridien et para symptomatique, Tuberculose, Brucellose, Péripneumonie contagieuse des bovidés, Fièvre aphteuse, Anaplasmose, Dermatophilose, Gale et Verminoses.

Le degré de prévalence des infections et infestations chez l’espèce bovine varie d’une zone d’élevage à une autre et d’une province à une autre suivant les pathologies (Tableau 1) (Anonyme, 2009).

Diagnostic

Pour le diagnostic des maladies, la RDC dispose de trois laboratoires vétérinaires à Kinshasa, Lubumbashi et Goma. Celui de Kinshasa produit les vaccins ci-après: COLIVAC (contre la colibacillose), ANTRAVAC (contre le charbon bactéridien), SYMPTOVAC (contre le charbon symptomatique) et le B19 (contre la brucellose).

• L’accès aux laboratoires n’est pas aisé à cause du coût élevé de déplacement.

• Les techniques diagnostiques utilisées pour identifier les maladies passent notamment par les analyses sanguines et les tests des cultures.

• Les stations de recherches zootechniques datant de la colonisation n’exécutent plus d’activités liées à l’élevage bovin. C’est essentiellement les stations de N’Vuazi, Ngandanjika, Nioka et Kiyaka.

Fourniture et Administration des médicaments et intrants

La RDC compte de petites maisons de vente des produits et matériels vétérinaires et zootechniques détenus par des privés. Ils sont dépendants de l’étranger et survivent difficilement. L’usage des antibiotiques et des autres produits respectent très peu les normes.

Le Dépôt de vente de Produits et Matériels Vétérinaires d’élevage (DPMV) et les maisons de représentation de grandes marques (PFIZER, BAYER, ROUSSEL, RHONE MERIEUX, CIBA GEIGE) opérationnelles au cours des années 70, 80, et 90 ont cessé toute activité.

Isolement et quarantaine

Il s’agit de la mise en œuvre des mesures d’isolement et de quarantaine pour les animaux malades afin d’éviter la propagation des maladies contagieuses. Les mesures d’isolement et la quarantaine sont peu respectées en RDC.

Éducation et formation

C’est la formation des éleveurs et des travailleurs agricoles sur la reconnaissance des signes de maladies et les pratiques de traitement approprié.

Innovations et recherche

Beaucoup de pays investissent dans la recherche et le développement de nouvelles technologies pour améliorer la santé bovine, y compris des diagnostics avancés et des traitements innovants.

En RDC, les recherches zoosanitaires ne sont pas prises en charge par le gouvernement depuis 1960. Les stations de recherche créées à l’époque coloniale tels Nyoka, Nvuazi, Ngandanjika et Kipopo sont délaissées: infrastructures délabrées, sans équipement.

Seules certaines universités qui développement les facultés d’agronomie ou de médecine vétérinaire publient les résultats de quelques recherches dans leurs revues scientifiques.

Défis de traitement des maladies

Les contraintes zoosanitaires liées au mode d’élevage extensif dominant en RDC, avec comme corollaires la divagation des animaux dont les conséquences sont la consanguinité, le mauvais contrôle sanitaire et la vulnérabilité des animaux aux maladies aux vols et des conflits entre acteurs du milieu ont été relevés par Anonyme (2017b). Il s’agit de:

• Recrudescence des épizooties et des principales maladies du bétail des régions tropicales;

• Présence massive des vecteurs et autres intermédiaires de plusieurs maladies d’animaux;

• Insuffisance du personnel d’encadrement sanitaire à tous les niveaux;

• Absence de représentations dans le pays des firmes spécialisées dans la production des produits vétérinaires;

• Systèmes d’informations zoosanitaires déficitaires (insuffisance des données statistiques) pour les maladies animales;

• Accès limité aux soins et aux infrastructures vétérinaires;

• Manque de technologies appropriées pour améliorer la gestion des maladies;

• Conditions sanitaires insuffisantes et absence de pratiques d’hygiène et de systèmes de gestion sanitaire des troupeaux contribuent à la propagation des maladies animales (FAO, 2002).

Dangerosité des maladies bovines sur la population

La RDC, comme d’autres pays, a réalisé une évaluation du Règlement Sanitaire International (RSI 2005) en 2016 afin d’évaluer ses capacités à prévenir, à détecter et à riposter rapidement à des menaces pour la santé publique.

Le Ministère de la santé publique de la RDC a mis sur pied une Stratégie Nationale Multisectorielle de Communication des Risques liés aux Six Groupes de Zoonoses Prioritaires pour la période de 2020 à 2024 (Rage, Fièvre hémorragique virale dont la Maladie à virus Ebola et la Fièvre de la Vallée de Rift, les Arboviroses dont la Fièvre jaune, les Grippes dont la Grippe aviaire, les Salmonelloses et Monkey pox) (Anonyme, 2019).

Comportement de la Communauté

• Faible niveau de connaissance des zoonoses par les communautés et faible application des mesures de prévention des zoonoses par les communautés;

• Mauvaise perception du risque sanitaire au niveau communautaire;

• Rejet communautaire des interventions de lutte contre les zoonoses;

• Faiblesse du dispositif institutionnel de réponse aux zoonoses.

Obstacles aux comportements souhaités

• Faible connaissance et mythes erronés entourant les zoonoses;

• Faible perception des risques par rapport à la transmission de la maladie d’un animal contaminé vivant ou mort à l’homme;

• Manque d’informations et de sensibilisation des communautés sur les zoonoses;

• Conviction profondément ancrée dans la pratique quotidienne des populations;

• Absence ou insuffisance dans certaines localités des services vétérinaires et manque d’informations sur les lieux et les périodes de vaccination;

• Insuffisance de moyens financiers des acteurs de la filière bétail.

CONCLUSION

Le gouvernement de la RDC ne dispose pas formellement des lois sur l’élevage et sur la santé animale. Les textes en cours d’utilisation sont obsolètes et datent de la période d’avant 1960. Leur application engendre beaucoup de confusion dans la collaboration et dans la coordination. Les acteurs tant institutionnels et que privés se marchent sur les pieds. Les investisseurs étrangers ne se sentent pas encouragés ou protégés à s’engager par manque d’orientation claire.

Les stratégies définies dans différents programmes des gouvernements qui se sont succédées depuis 1960 à 2023 souffrent de cohérence entre les programmes, des insuffisantes criantes dans leur application et leur impact reste mitigé.

Une menace pèse sur la santé des bovins affectant ainsi la croissance de la production et le rendement efficient et ce de manière quasi permanente.

Le Ministère de Pêche et Élevage définit les programmes de prévention des maladies en termes des vaccinations et des mesures générales d’hygiène et d’alimentation mais leur application dépend des moyens financiers octroyés par le gouvernement mais qui sont fort limités au point que certaines épidémies n’ont jamais bénéficié de lutte planifiée et organisée.

La politique de surveillance des maladies n’est pas systématique. Le gouvernement, notamment à cause de plus de trois décennies des conflits et des guerres, maîtrise difficilement les mouvements des bétails et n’est pas en mesure de dresser une cartographie précise des menaces des maladies à travers le pays.

L’éducation et la sensibilisation des éleveurs ne se font pas pour de raisons de sécurité, d’accessibilité physique à cause du délabrement des routes de desserte agricole et de longues distances pour atteindre les éleveurs.

Les maladies des bovins émergentes et récurrentes sont établies mais le gouvernement ne donne pas de moyens pour dresser les cartographies, les actualiser, mettre des services zootechniques et vétérinaires avec des médicaments et intrants pour la lutte.

Les zoonoses affectant la santé publique sont dotées d’un programme de prévention et de traitement défini dans le cadre de «one health», de la Stratégie nationale multisectorielle de communication des risques liés aux six groupes de zoonoses prioritaires en République Démocratique du Congo 2020-2024, espace de travail qui réunit le Ministère de la Santé publique et les autres ministères dont celui de Pêche et Élevage.

En vue d’améliorer les politiques de prophylaxie, d’épidémio-surveillance, de traitement des maladies animales et des zoonoses en RDC, le gouvernement doit relever systématiquement les défis relevés et chercher des pistes des solutions.

RÉFÉRENCES 

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Publié-e

22-02-2025

Comment citer

MITEYO, B., KABAMBA MWAMBA, M. W., TSHIKUNG, D., LUTUTALA, B., & PONGOMBO, C. (2025). Politiques de prophylaxie, d’épidémio-surveillance, de traitement des maladies bovines et des zoonoses en RD Congo de 1960 à 2023. Revue Marocaine Des Sciences Agronomiques Et Vétérinaires, 13(1), 27–32. https://doi.org/10.5281/zenodo.15018430

Numéro

Rubrique

Production et Santé Animales

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