Prévalence des infestations de tiques sur les zébus Goudali et Bororo au Gabon

Auteurs-es

  • Dieudonné MOUBAMBA MBINA Institut de Recherche Agronomiques et Forestières, Libreville, Gabon
  • Lin-Sosthène SOUMBOU Institut de Recherches Technologiques, Libreville, Gabon

DOI :

https://doi.org/10.5281/zenodo.16734039

Mots-clés :

Bovins, Goudali, Bororo, Prévalences, Infestations, Sites de prédilection, Gabon, Camerou

Résumé

La présente étude avait pour but d’identifier les espèces de tiques qui infestent les bovins du Cameroun importés par le Gabon, d’évaluer et comparer d’une part les prévalences de ces arthropodes entre les races bovines et d’autre part entre leurs sites de prédilection. Cette étude cherchait également à déterminer parmi les tiques importées celles qui s’adaptaient ou pas à l’environnement gabonais.  Au total 156 bovins (Goudali et Bororo) âgés entre 5 et 6 ans avaient été évalués par cette étude. Le corps de ces animaux avait été divisé en 6 zones anatomiques ou sites de prédilection. Amblyomma variegatum (30,4%), Rhipicephalus decoloratus (65,2%), Rhipicephalus lunulatus (1,5%), Rhipicephalus simpsoni (0,6%), Hyalomma trucantum (2,1%) et Hyalomma impeltatum (0,2%) étaient les espèces de tiques identifiées au cours de cette étude, les plus abondantes étant Amblyomma variegatum et Rhipicephalus decoloratus. Les zébus Goudali ont montré un taux d’infestation significativement plus élevé que les zébus Bororo. L’abdomen fut le site le plus significativement infestés par les tiques. Aucune corrélation n’existait entre le nombre d’espèces de tiques et les prévalences des infestations au niveau des sites de portage des tiques, cependant il existait une corrélation fortement positive entre le nombre de tiques et les taux d’infestation des sites de prédilection. De toutes les espèces de tiques importées du Cameroun vers le Gabon, seuls Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum ne sont pas capables de s’adapter à l’environnement chaud et humide du Gabon parce vivant habituellement en zones arides et semi-arides. A contrario, Rhipicephalus lunulatus, espèce hygrophile mais pas présente dans le pays trouve un milieu idéal de vie compatible avec son cycle de développement.

Mots clés: Bovins, Goudali, Bororo, Prévalence, tique, Infestation, site of prédilection, Gabon, Cameroun

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 INTRODUCTION

Les tiques sont des invertébrés hématophages, il existe environ 866 espèces de tiques dans le monde (Walker, 2003) responsables d’énormes pertes en productions animales. Ces ectoparasites sont un facteur limitant en production bovine qui frappe l’Afrique, l’Asie, l’Amérique latine et l'Australie (Betancur Hurtado et Giraldo-Ríos, 2018; Macleod, 1999). La Babésiose, la Thélériose, la Heartwater et l’Anaplasmose sont les principales maladies animales associées aux tiques qui sont à la fois mortelles et freinent la production de lait et de viande dans ces grandes régions du monde. En Asie et en Australie, une tique adulte est à l’origine de la perte de 5 kilogrammes de viande par an par animal et 127 litres de lait par an par animal. En Afrique, ces valeurs sont respectivement de 4 kg/animal/an et 201litres/animal/an (Macleod, 1999). En santé publique, ces arthropodes occupent la seconde place après les moustiques (Department defense of the united of states of america, 2012), ils sont responsables de la transmission des bactéries telles que Rickettsia africae, Rickettsia conori, Eherlichia chaffeensis, Anaplasma capra, des parasites comme Babesia microti, et des arbovirus à l’exemple des virus Dugbe et Thogoto pour ne citer que ceux-là. Tous ces pathogènes sont impliqués dans l’apparition des zoonoses, d’ailleurs certains parmi eux sont des microbes émergents (Zan Diarra et al., 2023; Westblade et al., 2017). Le Gabon importe des milliers de bovins chaque année pour satisfaire les besoins des populations de la ville de Libreville en protéines animales. Ces importations favorisent l’entrée des tiques du Cameroun (Moubamba, 2006) qui voyagent attachées à leurs sites de fixation sur le bétail importé et probablement aussi des pathogènes associés à ces tiques puisque dans leur pays d’origine ces races bovines importées souffrent des maladies transmises par les tiques (Hayatou et al, 2023). La connaissance de ces sites est importante dans le cadre de la lutte contre des tiques et les maladies qu’elles transmettent. Aussi, parmi ces arthropodes certains pourraient s’adapter à leurs nouveaux biotopes ici au Gabon tout comme d’autres y éprouveraient des difficultés à s’y installer.

La présente étude a pour objectif d’identifier les espèces de tiques infestant les bovins du Cameroun importés par le Gabon, de déterminer les sites de prédilection de ces arthropodes sur leurs hôtes, d’étudier les prévalences des infestations associés à ces acariens sur ces sites, d'étudier la corrélation entre le nombre d’ espèces de tiques infestant les sites de prédilection et leurs prévalences sur ces sites de portages, et entre le nombre des tiques infestant ces sites et leurs prévalences ainsi que de détecter les espèces de tiques qui peuvent s’adapter à l’environnement Gabonais.

MATÉRIEL ET MÉTHODES

Site de l’étude

Pour cette étude, les prélèvements ont eu lieu sur des bovins à l’abattoir d’Owendo situé dans la commune d’Owendo au sud de la ville de Libreville.

Animaux de l’étude

L’étude a été réalisée entre Août 2018 et Septembre 2019 sur des bovins mâles appartenant soit à la race Goudali soit à la race Bororo importés du Cameroun, leur âge était compris entre 5 et 6 ans. De l’arrivée à l’abattage, ces animaux n’avaient reçu aucun traitement acaricide.

Tiques des bovins importés du Cameroun

Les tiques ont été collectées une fois par mois pendant un an sur les animaux arrivant du Cameroun. Elles ont été Placées dans des flacons de 10 ml contenant de l’éthanol à 70% puis conduits au laboratoire pour identification. Une loupe binoculaire et des manuels d’identification des espèces de tiques (Walker et al., 2023; Rageau, 1953) avaient été utilisés pour caractériser ces arthropodes. Les fréquences relatives de toutes les espèces identifiées avaient été évaluées en pourcentage.

Détermination des prévalences d’infestations des tiques importées sur les bovins arrivant du Cameroun

Le calcul des prévalences des infestations des tiques a concerné les races bovines et les sites de prédilection des tiques qui sont les zones de fixation de ces ectoparasites sur le corps des bovins importés. Pour faciliter le calcul et l’application des tests statistiques de ces prévalences, le corps des animaux avait été divisé en 6 régions anatomiques (Figure 1) à savoir: La tête (la tête et les oreilles), le cou (cou, fanon et pointe de poitrine), le dos (dos, les épaules et les côtes), l’abdomen (abdomen, les testicules, les aisselles et le thorax), le périnée (périnée, la queue, l’anus et l’inguinal), Les membres (les membres inférieurs et les membres supérieurs). La formule suivante: Prévalence = Nombre de cas infestés/Effectif de la population exposée avait été appliquée pour le calcul des prévalences. Ces prévalences étaient exprimées en pourcentage.

Co-infestations des espèces de tiques sur les sites de fixation

L’importance ou la taille des co-infestations des espèces de tiques sur chaque site de prédilection a été évaluée en comptant le nombre d’espèces composant chaque co-infestation sur chaque site de prédilection, et la fréquence relative des espèces de tique associées aux co-infestations sur chaque site de fixation a été évaluée à l’aide de la formule F= (Nombre de tiques de chaque espèces présentes sur le site de portage/Effectif global des tiques du site) x100. Le résultat obtenu a été exprimé en pourcentage.

Étude des corrélations entre les facteurs associés aux infestations des tiques

Des corrélations ont été réalisées pour comprendre l’évolution des prévalences en fonction du nombre des espèces de tiques formant les co-infestations des sites de fixation d’une part, d’autre part l’évolution des prévalences a également été étudié en fonction du nombre sites de prédilection infestés.

Capacités d’adaptation des tiques importées du Cameroun à leur nouvel environnement

Dans le but d’évaluer la présence ou l’absence des espèces de tiques associées à cette étude au cours de l’année, ces arthropodes ont été récoltés une fois par mois sur les bovins Camerounais arrivant à l’abattoir d’Owendo. Les résultats ou les effectifs mensuels d’espèces de tiques issus de ces prélèvements ont été représentés à l’aide de couleurs dans un graphe. Les couleurs jaunes, vert, bleu, gris, rose brun représentaient respectivement Rhipicephalus (Boophilus) decoloratus, Amblyomma variegatum, Rhipicephalus lunulatus, Rhipicephalus simpsoni, Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum lorsqu’elles étaient présentes, la couleur blanche signalait l’absence d’une ou plusieurs espèces de tique à un moment donné de l’année.

Tests statistiques

Un site web contenant des calculateurs statistiques (Statistics kingdom, 2025) a été utilisé pour comparer les prévalences. Aussi, le même site a servi dans l’étude des corrélations entre les prévalences et le nombre des espèces de tiques infestant les sites de fixation d’une part et d’autre part entre les prévalences et le nombre de site infesté par les tique et entre le nombre de tiques parasitant les site de portages. L’intervalle de confiance des tests a été fixé à 95% avec un seuil de signification de P= 0,05. Pour la comparaison des prévalences de sites de fixation deux à deux, le seuil de signification du test était α=0,0033.

RÉSULTATS  

Espèces des tiques infestant les bovins importés du Cameroun

6 espèces de tiques appartenant à la famille des Ixodidae infestant les bovins du Cameroun ont été identifiés au cours de cette étude (Tableau 1).

Prévalence des infestations des tiques chez les bovins importés

Concernant les taux d’infestations des tiques chez les bovins Camerounais importés au Gabon, la prévalence des infestations des zébus Goudali était très significativement plus élevée que celle des zébus Bororo avec des valeurs respectives de 84% et 16% (P< 0,05) (Figure 2, Tableau 2).

Prévalences des infestations des tiques sur leurs sites de prédilection chez les bovins

La figure 3 représente les taux des infestations des tiques sur leurs sites de portage chez les bovins importés du Cameroun. De tous les sites de prédilection, l’abdomen était significativement le plus infesté de tous avec une prévalence 76,3% (P< 0,05), le plus faible taux d’infestation ayant été observé au dos et à la tête avec une valeur de 1,3%.

Hypothèses

H0 (Hypothèse nulle): Les taux d’infestation de tiques sur les sites de prédilection chez les bovins importés du Cameroun sont les mêmes avec P-value>0.05, l’hypothèse nulle est rejetée.

H1 (Hypothèse alternative): Chez les bovins importés au moins un site de fixation à un taux d’infestation qui est différent des taux des autres sites de portage, l’hypothèse alternative est donc acceptée parce que P-value<0.05 (0,0000006 <0,05) (Tableau 3).

Le test de Benferroni a montré que par comparaison aux autres sites de prédilection, l’abdomen était le site ayant le taux de prévalence significativement le plus élevé (P-value < 0,0033) (Tableau 4).

Tailles des co-infestations des espèces de tiques dans leurs sites de portage sur les bovins importés

La figure 4 représente le nombre des associations des espèces de tiques infestant chaque site de prédilection. L’abdomen, le cou, le périnée et les pattes ont été les sites ayant enregistré les plus grandes associations composées de 5 espèces de tiques, les sites abritant les associations de petites tailles furent la tête et le périnée avec 3 espèces de tique chacun.

La figure 5 présente la diversité des espèces de tiques qui ont parasité chaque site de fixation chez les bovins camerounais rentrant au Gabon. Amblyomma variegatum, Hyalomma impeltatum, Hyalomma truncatum, Rhipicephalus simpsoni, Rhipicephalus (Boophilus) decoloratus ont participé à la co-infestation de l’abdomen, l’une des 2 régions anatomiques ayant la plus grande diversité de tiques chez les zébus importés du Cameroun. Le cou le deuxième site le plus richement diversifié en espèces de tiques a été infesté par les mêmes espèces que celles qui ont été observées à l’abdomen. La tête et le dos les sites les moins diversifiés en espèces de tiques ont été tous deux parasités par Rhipicephalus decoloratus et Hyalomma truncatum

Corrélation entre les co-infestations des espèces de tiques et leurs prévalences sur les sites de fixations

La droite des moindres carrés Y = 19,5 x - 61,5 (Figure 6) représente les prévalences des infestations des espèces de tiques en fonction du nombre des espèces de tiques formant les co-infestations sur les sites de portage chez les bovins importés du Cameroun. Pour r2 = 0,311, avec 0 <R2 <1, le coefficient de Pearson (Tableau 6) et l’analyse de variance (Tableau 5) ont montré une faible corrélation positive entre les prévalences des infestations des espèces de tiques et la taille des co-infestations de ces arthropodes sur leurs sites de prédilection, mais l’hypothèse nulle ayant été retenue car P-value= 0,2495 > 0,05, il n’y a pas eu de corrélation significative entre les deux variables étudiées.

Corrélation entre le nombre de tiques et les prévalences des infestations associées aux sites de fixation

La droite des moindres carrés Y= 0,00641 x -0,0032 (Figure 7) représente les prévalences des infestations en fonction du nombre du sites de portage infestés par les tiques chez les bovins importés du Cameroun. Pour r2 = 1 avec 0 <R2≤ 1, le coefficient de Pearson (Tableau 8) et l’analyse de variance (Tableau 7) ont montré une forte corrélation positive entre les prévalences et le nombre de sites de prédilection infestés par les tiques. L’hypothèse nulle a donc été rejetée parce que P-value=0,000000003639 < 0,05. Il y a donc eu une corrélation positive très significative entre les deux variables étudiées.

Capacité d’adaptation des tiques originaires du Cameroun à l’environnement Gabonais

La figure 8 représente la dynamique des populations des espèces de tiques collectées sur les bovins du Cameroun importés au Gabon sur une période d’un an. Les espèces Rhipicephalus décoloratus et Amblyomma variegatum ont été présentes sur les animaux tout au long de l’année, leur nombre variait entre 46 et 122 chez Rhipicephalus décoloratus entre 22 et 73 chez Amblyomma variegatum. Pendant la même période, les espèces restantes sont apparues par intermittence, leur fréquence d’apparition variait entre 2 et 11 tiques pour Rhipicephalus lunulatus, 2 pour Rhipicephalus simpsoni, entre 3 et 13 pour Hyalomma truncatum et entre 1 et 2 pour Hyalomma impeltatum.

DISCUSSION 

Des 2 races bovines étudiées, les zébus Goudali ont montré un taux d’infestation aux tiques significativement plus élevés que celui des bovins Bororo. Malgré ces différences observées entre ces 2 races, les zébus sont tout de même plus résistants aux tiques que les taurins (Mandonnet et al., 2011). Le cou, la tête, l’abdomen, les pattes, le dos et le périnée ont été les sites de fixation sur lesquelles les tiques importées du Cameroun ont été prélevées chez les zébus de ce pays arrivant au Gabon. De tous ces sites, l’abdomen a été le site le plus significativement infesté majoritairement par Rhipicephalus décoloratus et par Amblyomma variegatum. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus par Nejash qui avaient montré que ce site de portage était la région anatomique la plus infestée par ces deux arthropodes dans une étude réalisée chez des bovins en Éthiopie (Nejash, 2016). Le CO2 issue de la respiration des bovins (Koser, 2019), la couleur claire de la robe (Steinberg et Berglund, 2005) et les phéromones émis par les tiques femelles présentes sur ces animaux (Gowrishankar et al., 2021) constituent des éléments attractifs pour les tiques cherchant un hôte. De telles substances pourraient être désignées sous le terme de facteurs de regroupements parce que contribuant à rassembler les tiques sur leur hôte. La préférence ou le choix des sites de fixation par les tiques sur leur hôte dépend aussi de plusieurs facteurs tels que l’épaisseur et la vascularisation de la peau (Mushahary et al., 2019), l’abondance des poils (Lee et al., 2024), l’humidité et la chaleur dégagée par les sites (Muchenje et al., 2008) et aussi par la longueur des pièces buccales des ectoparasites qui les infestent (Bedouhene et al., 2022), ce dernier groupe de facteurs pourraient être rangé dans la catégorie des facteurs de fixation. Pour les odeurs, il s’agit de celles associées aux acides gras volatils issus de la digestion des animaux qui appâtent les tiques, ce sont par exemple les acides caboxyliques et de certaines molécules aromatiques composant le fumier (Mushahary et al., 2019; Poldy, 2020; Woodbury et al., 2013). Ces substances se fixeraient pendant une certaine durée sur le corps des animaux, plus précisément sur les sites de prédilection portant les empreintes des fèces parce que pendant leur repos les animaux peuvent se coucher au sol sur leurs fèces qui peuvent contaminer les sites de portage des tiques localisés sur le corps de ces animaux. De même, la peau des bovins produit également des acides gras volatiles et des aldéhydes qui contribueraient aussi à la fixation des tiques sur leurs hôtes (Poldy, 2020). L’infestation des sites de prédilection par les tiques dépendrait donc de la combinaison des facteurs d’attraction et des facteurs de fixation sur ces sites. Aussi, la manifestation des saisons pourrait influencer la variation des facteurs de fixation sur les sites de portage, cette variation pourraient donc modifier positivement ou négativement la prévalence des infestations des tiques dans ces régions anatomiques, puisque les saisons peuvent influencer les paramètres d’infestation des tiques chez les animaux (Laamri et al., 2012). La forte expression des facteurs de fixation sur l’abdomen par rapport aux autres sites de portage expliquerait de façon significative la plus forte prévalence observée sur ce site comparativement autre sites de fixation, c’est d’ailleurs cette région anatomique qui a été la plus infestée par les espèces de tiques importées les plus prédominantes de l’étude qu’étaient Amblyomma variegatum et Rhipicephalus decoloratus. D’autres substances volatiles telles que le benzaldehyde, l’hexylacétate produites par la peau des bovins sont répulsives pour les tiques (Zhang et al., 2024). De telles sécrétions ne s’étaient probablement pas exprimées significativement à l’abdomen, leur absence sur ce site expliquerait peut être la plus forte prévalence des infestations des tiques observées sur cette région anatomique. Sur les sites où ces substances étaient plus présentes, les prévalences étaient les plus faible, ce qui fut le cas des 5 sites restants puisque le nombre de tiques sur ces sites était significativement plus faibles que sur l’abdomen. Au vue de ce qui précède, il est probable que les aldéhydes et les esters agissent de façon antagoniste avec les acides gras volatils sur la dynamiques des populations des tiques sur les sites de portage.

A propos des co-infestations, Rhipicephalus decoloratus et Hyalomma truncatum ont participé à toutes les co-infestations sur tous les sites de prédilection avec des fréquences relatives maximales respectives de 95% et 15%, ce qui signifie que tous ces sites ont été exposés aux piqûres de ces 2 espèces de tique mais Rhipicephalus decoloratus était 6 fois plus fréquents que Hyalomma truncatum. Tous les sites de fixation des tiques étaient donc de potentielles portes d’entrée de l’anaplsamose bovine et de la babésiose bovine transmissible par Rhipicephalus decoloratus. Il en était de même pour la fièvre hémorragique de Crimée-Congo, une zoonose qui ne menace jamais la santé des bovins. Cependant, ces animaux constituent des réservoirs sur le court terme puisque la phase virémique de cette maladie ne dure pas et est asymptomatique, seuls les anticorps peuvent persister plusieurs mois, voire plusieurs années (Giuli, 2023). C’est probablement au cours de la phase vérimique que les tiques du genre Hyalomma sp se contamineraient à partir de leurs hôtes. En dehors de la tête, Amblyomma variegatum a été impliqué dans des co-infestations sur les sites restants avec des fréquences maximales atteignant 40% au niveau de ces sites. Les éventuelles portes d’entrées des pathologies telles que la heartwater et la fièvre africaine à tique, dont la transmission est associées à cet arthropodes, pourraient donc être l’abdomen, le dos, les pattes, le périnée et le cou puisque ces site de fixation ont été soumis à des fréquences de piqûres dues à Amblyomma variegatum variant entre 3% et 40%. Il est à noter que la fièvre à tique africaine est une zoonose qui n’a aucun impact sur la santé des bovins, ces animaux sont simplement des réservoirs secondaires (Davoust et al., 2010) qui permettent aux rickettsies, y compris Rickettsia africae, de persister dans les écosystèmes faisant ainsi de ces bovins de potentielles sources de contamination ou de re-contamination des tiques telles que Amblyomma variegatum vectrice de Rickettsia africae pathogène responsable de la fièvre africaine à tiques chez les humains. Il est aussi important de faire remarquer que l’abdomen et le cou ont été les sites de portage à avoir enregistré les co-infestations les plus importantes observées chez les bovins arrivant du Cameroun, elles étaient composées de 5 espèces de tiques. Amblyomma variegatum et Rhipicephalus decoloratus étaient les espèces de tiques les plus dominantes de ces co-infestations, cela n’est pas surprenant puisqu’elles étaient aussi les espèces de tiques significativement les plus abondantes de toute l’étude. La présence de Rhipicephalus simpsoni dans la co-infestation des tiques à l’abdomen ne représentait pas une menace pour la santé des zébus puisque cet arthropode est une tique qui habituellement parasite les aulacodes (Pourrut et al., 2011), elle a accidentellement infesté les bovins importés du Cameroun. L’analyse des facteurs de risque associés à l’infestation des sites de fixation des tiques ainsi que l’étude des charges parasitaires de ces arthropodes sur ces sites constituent des éléments à prendre en compte pour mieux évaluer l’impact des infestations des tiques sur les bovins du Cameroun arrivant au Gabon par l’intermédiaire du commerce transfrontalier de bovins.

Concernant les corrélations, les études ont montré une très faible corrélation positive d’une part entre la taille des co-infestations des espèces de tique sur les sites de fixation et les prévalences, aucun lien n’existait entre les espèces de tiques infestant les sites de fixation et les prévalences des infestations de ces sites. A l’inverse, une très forte corrélation positive a été observée d’une part entre le nombre de site infestés par les tiques et les prévalences de ces infestations de ces sites, il y a donc eu un lien entre le nombre de sites de prédilection infestés et les prévalences des infestations des sites de portage. L’étude des corrélations a montré que la concentration des espèces de tiques sur les sites de prédilection n’influençait pas la prévalence des infestations, donc le nombre de sites infestés constitue le meilleur paramètre ou le meilleur indicateur du niveau d’infestation des sites de fixation des tiques sur le corps des bovins, ce paramètre est important à prendre en compte lorsque qu’on veut placer des bovins sous traitement acaricides.

A propos de l’évaluation des capacités d’adaptation des espèces de tiques introduites au Gabon par les zébus importés du Cameroun, seules Amblyomma variegatum et Rhipicephalus decoloratus étaient présentes toute l’année sur leurs hôtes. Elles sont présentes en Afrique au Sud du Sahara sauf pour Amblyomma variegatum qui à partir de la Bande de Caprivi voit sa progression freinée en direction de l’Afrique du Sud par Amblyomma hebraheum (Bournez et al., 2015), cependant, sa distribution s’étend jusqu’à Madagascar, aux Comores et à la Réunion (Guinat, 2012). Ces 2 arthropodes sont adaptés à vivre dans les régions semi-arides, tropicales et équatoriale (Morel, 1953), leur capacité à trouver des hôtes qui leur conviennent dans ces 3 zone climatiques est aussi un autre facteur qui montre leur capacité d’adaptation à ces environnements. Ces 2 espèces de tiques qui sont introduites au Gabon par les zébus importés du Cameroun se trouvent dans leur environnement naturel puisque ce pays a un climat équatorial (Pourrut et al., 2011). Pour les 4 espèces de tiques restantes, à savoir Rhipicephalus simpsoni, Rhipicephalus lunulatus, Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum, contrairement aux deux espèces précédentes, sont apparus fixées sur leurs hôtes de façon intermittente tout au long de l’année de cette étude. Rhipicephalus simpsoni est une espèce qui parasite les Aulacodes (Pourrut et al., 2011) et sa présence chez les bovins en provenance du Cameroun était due à des infestations accidentelles puisque cette espèce de tique n’infeste pas les bovins, cet arthropode est présent au Gabon, sa distribution qui s’étend sur toute l’Afrique subsaharienne montre bien que Rhipicephalus simpsoni au Gabon est dans son environnement naturel. Rhipicephalus lunulatus est un acarien des zones hygrophiles, c’est donc une espèce de tique adaptée aux régions dont la pluviométrie se situant entre 2000 mm et 2500 mm (Saratiotis, 1977), c’était la première fois que la présence de cet arthropode était signalée au Gabon où elle est apte à y vivre puisque la pluviométrie de ce pays se situe entre 1400 mm et 3200 mm (FAO, 2005). C’était donc une tique étrangère qui a été introduite au Gabon par les zébus du importés du Cameroun car l’inventaire des tiques du Gabon (Pourrut et al., 2011) ne mentionnait pas la présence de cet arthropode dans le pays. Il en fut de même pour les espèces Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum qui sont des espèces des régions arides et semi-arides (Walker et al., 2003; Morel, 1953) qui ne peuvent pas s’adapter à l’environnement Gabonais puisque trop humide. Cependant, leurs brèves incursions dans ce pays pourraient constituer une menace pour la santé publique et animale à cause des pathogènes qu’ils transmettent aux hommes et aux animaux. C’est la première fois que ces espèces de tiques sont également signalées au Gabon puisque ne faisant pas partie de la liste des tiques vivant dans ce pays (Pourrut et al., 2011).

CONCLUSION 

Amblyomma variegatum, Rhipicephalus decoloratus, Rhipicephalus lunulatus, Rhipicephalus simpsoni, Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum sont les espèces de tiques introduites au Gabon par les Bovins du Cameroun. De tous les six sites de fixation des tiques délimités sur le bétail, l’abdomen a été le site ayant le plus grand taux significatif d’infestation. Amblyomma variegatum et Rhipicephalus decoloratus ont été les espèces de tiques les plus prédominantes ayant infesté l’abdomen. Une très faible corrélation positive a été observée entre le nombre d’espèces de tiques infestant les sites de prédilection et les prévalences des infestations des sites, à contrario une très forte corrélation positive avait été observée entre le nombre de tiques infestant les sites de fixation et les prévalences des infestations. Le nombre de sites de fixation infestés par les tiques indique l’ampleur des infestations par les tiques chez le bétail. Pour la première fois, les bovins du Cameroun ont introduit 3 nouvelles espèces de tiques au Gabon à savoir: Rhipicephalus lunulatus, Hyalomma truncatum et Hyalomma impeltatum. La première espèce est très adaptée à l’environnement Gabonais tandis que les deux autres sont des tiques des régions arides et semi arides.

RÉFÉRENCES

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Publié-e

09-07-2025

Comment citer

MOUBAMBA MBINA, D., & SOUMBOU, L.-S. (2025). Prévalence des infestations de tiques sur les zébus Goudali et Bororo au Gabon . Revue Marocaine Des Sciences Agronomiques Et Vétérinaires, 13(3), 266–272. https://doi.org/10.5281/zenodo.16734039

Numéro

Rubrique

Production et Santé Animales

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